Rayna est une jeune fille de dix-huit ans au tempérament explosif, au visage d’ange. Pour survivre, avec sa mère et sa sœur, elles fabriquent des statuettes d’argile qu’elles vendent aux touristes sur le bord de la route. Pour échapper à la grisaille de la vie, Rayna invente souvent des histoires au risque de mettre en péril le fragile équilibre de la famille.

Malgré la sortie en salles de son film précédent « Thirth », le second long métrage de Svelta Tsortsorkova n’ayant pas reçu de financement d’état suffisant, n’a pu se faire que grâce au soutien d’amis.

« Sister » a été tourné dans le village où Svelta Tsotsirkova possède une maison et où l’artisanat de la poterie est souvent une affaire de famille. A un endroit où, pour se procurer de l’argile, il suffit de creuser dans les cours ou dans les jardins attenants à l’habitation.

« Sister » met en scène une famille composée essentiellement de femmes qui vivent en vase clos et n’entretiennent qu’un maigre lien avec le monde extérieur. Le récit s’attache au regard porté sur une famille dysfonctionnelle à travers les relations qui existent entre les trois femmes et le seul homme qui apparaît dans ce microcosme. L’enfermement en vase clos engendre méfiance, suspicion et peur de l’autre, fut-il un familier.

Toutes les trois sont célibataires et ont du mal à établir avec l’autre une complicité à portée de main qui pourrait adoucir leur existence.

Rayna, elle, tente d’échapper à cet environnement étouffant par le mensonge mais son innocence doublée de perversité est assez forte pour atteindre et risquer de détruire le monde des autres.

Au début, ses mensonges sont plutôt drôles. Ils apparaissent comme inoffensifs et sans réelle conséquence sur son environnement mais au fur et à mesure du récit, ils se révèlent être de plus en plus nocifs.

Derrière la peinture de cette micro-société singulière, s’insèrent de nombreux autres thèmes qui viennent épaissir le propos initial comme la corruption policière ou l’émigration et le film qui avait une portée sociale limitée à la famille de Rayna, reposant sur l’anecdote, prend avec le recul une dimension plus vaste et une réelle consistance dramatique.

Monika Naydemov qui apparaissait dans « Thirth », un rôle pour lequel elle avait remporté un prix d’interprétation, est magnifique. Sa blondeur, sa silhouette diaphane et son visage d’ange montrent une apparente innocence avec d’entrée ce qu’elle contient de vénéneux.

Un film rude, cruel. Une œuvre forte et sans concession.

Francis Dubois

« Sister » – Un film de Svelta Tsotsorkova (Bulgarie) – Sortie en salles le 7 octobre 2020.


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