« Il n’y a qu’une façon d’aimer », M. Barbey, Le Condottière
Le journal de Monique Barbey, née en Suisse, « Il n’y a qu’une façon d’aimer » est un grand livre d’une femme qui aime, comme il le faut, à la folie qui en souffre mais qui lui donne une joie, un bonheur sans partage. Elle raconte aussi la vie d’une femme d’un milieu fermé, protestant partagé entre le recours à Dieu, à la folie des hommes et au coup de foudre réciproque. Ce journal ne cache rien pas seulement des affres de l’amour fou, de la lâcheté du général Koenig, qui ne veut pas rompre ses liens précédents, mais aussi de l’antisémitisme de ce milieu incapable de comprendre le génocide des Juifs pendant cette guerre. Elle raconte aussi le vie d’une femme mariée contre son gré et qui se noie dans toutes ses obligations. Il faudra qu’elle attende sa retraite pour devenir comédienne et écrivaine. Ce journal fait la démonstration qu’elle a eu tord d’attendre. A offrir sans modération.
« L’araignée pendue à un cil »
Marie-Paule Berranger nous invite dans les mondes de « 33 femmes surréalistes », femmes oubliées, une anthologie bien titrée « L’araignée pendue à un cil ». Une manière de fêter les 100 ans du surréalisme en donnant à entendre leurs voix. Essentiel et nécessaire.
Poésie/Gallimard
Un polar historique : « On a tiré sur Aragon », François Weerts, Rouergue/noir
« On a tiré sur Aragon » est une enquête étrange sur les raisons d’un coup de fusil qui a ciblé le poète en train de réviser « Les communistes », une somme qui se voulait à la gloire des militants. Pourquoi cet attentat ? Un privé qui fut proche du PC est chargé d’élucider le mystère. François Weerts fait œuvre d’historien retraçant le climat de cette époque terra incognita pour les générations d’aujourd’hui. Le Parti communiste joue un rôle central dans la vie politique française. La déstalinisation le touche de plein fouet. Il n’a pas encore digéré le « rapport Kroutchev ». Une excellente façon, même partielle, de s’introduire dans cette période de notre histoire. D’autant que l’auteur nous entraîne aussi sur le champ des affrontements littéraires. Un polar dans lequel le lecteur s’installe.
Science fiction ? « La vieillesse de L’Axolotl », Jacek Duraj, traduit par Caroline Raszka-Dewez, Editions Rivages
Jacek Duraj est un des grands auteurs polonais de science fiction, successeur de Lem. Face à l’effacement de la vie humaine – qui pourrait bien nous menacer -, des humains téléchargent leur esprit dans des robots et même , faute de temps, dans des robots industriels facteurs de scènes cocasses et drolatiques. Leurs pensées, leur volonté est de faire survivre uns société en essayant de l’organiser. « La vieillesse de l’Axolotl », sous titré « Hardware Dreams » les rêves d’une machine informatique pose la question de savoir si l’Intelligence artificielle – si elle existe – est capable de rêver qu’elle possède un esprit humain ou est-ce l’humain qui se rêve en machine habitant un corps d’emprunt ? Pour épaissir le mystère et provoquer des sensations étranges une page sur deux est consacré aux aventures de ces humains sans corps, l’oméga de Teilhard de Chardin en une nouvelle dimension, l’autre un dessin, une photo, des explications plus ou moins scientifiques, plus ou moins imaginées… A vous de jouer, avec les illustrations, avec les références diverses dont les emprunts au mangas… pour finir sur une interrogation comment perpétuer une civilisation ?
Littérature : « Qu’on me cherche et je ne serai plus », John Edgar Wideman, Traduit par Catherine Richard-Mas, Gallimard
« Qu’on me cherche et je ne serai plus », John Edgar Wideman participe d’une prière partagée par beaucoup d’Africains Américains dont il décrit la vie quotidienne sous forme de flashs qui son autant d’éléments d’une autobiographie qui ne dit pas son nom. Les histoires, un peu éclatées en une première lecture dues à la forme de nouvelles, prennent, après coup, la consistance d’une construction de vies dans un ghetto et dans le rejet d’une grande partie de la société. Le jazz, le blues, le gospel sont des ingrédients nécessaires à l’écriture de l’auteur. Il désespère – que dirait-il aujourd’hui après la victoire de Trump et ses nominations guignolesques et graves pour l’avenir de la démocratie – des Etats-Unis. Il rèussit son coup : nous faire réagir aux inégalités profondes, racistes, de la société américaine. A sa manière naïve et rouée il sait nous entraîner dans son monde.
Deux BD sur l’école
« Bienvenue à la SEGPA » présente les élèves qui sont considérés comme mis au ban de l’institution. Antoine Zito rend aux enseignant.e.s et aux élèves capables de se dépasser. Réjouissant.
« Derrière le portail » est, au sens fort du terme, un livre pédagogique qui montre à la fois la réalité du harcèlement et la manière d’y répondre. Emy Bill réussit un tour de force.
Editions Leduc
Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.
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