Il est difficile, pour ne pas dire hors d’atteinte, pour Virginie de concilier sa vie d’agricultrice avec celle de mère célibataire. Pour sauver sa ferme de la faillite assurée, elle décide de se reconvertir et de se lancer dans un nouvel élevage, celui des sauterelles (criquets migrateurs) comestibles. Mais peu à peu, ses enfants assistent à une transformation de leur mère et bientôt ne la reconnaissent plus. Entre temps, Virginie a établi un lien étrange avec ses sauterelles.

Just Philippot affirme qu’il n’a fait, en réalisant « La nuée », qu’un film d’aujourd’hui qui, à travers sa dimension fantastique, parle du déséquilibre qui affecte aujourd’hui le monde de l’agriculture en particulier : sa fragilité, son recours à des méthodes contestables qui tiennent à la volonté de produire moins cher.

Ce qu’il faut donner à ses sauterelles, plus que de la nourriture, c’est une part d’elle-même en plus du temps qu’elle leur consacre et elle ira jusqu’à leur donner ce sang, le sien dont elle découvre qu’elles sont friandes. Virginie est une femme seule. Il lui faut faire face à toutes les échéances qu’imposent d’élever des enfants, de payer des factures, un loyer. Quand elle prend sa décision de donner de son sang à ses sauterelles c’est qu’elle n’a pas d’autre choix. Pour elle qui, considère que l’élevage de demain est celui des insectes. Mais ce dont elle ne se doute pas, trompée par ses convictions et les exigences de la vie c’est qu’elle est en train de rentrer dans un système qui n’a pas changé. Le produit est trop cher, ce qui l’amène réduire les coûts de production et les prix de vente. Une course vers le petit profit qui lui fait mettre le doigt dans un engrenage…

Le film est très réaliste sur beaucoup de points et, lorsque l’histoire de Virginie dérive, il devient plus un film d’anticipation qu’un film de science-fiction. Le fantastique affleure quand le sang de Virginie modifie le métabolisme des sauterelles. Mais le sang n’a que valeur d’amphétamine. Virginie se sacrifie le plus naturellement du monde mais une fois les limites franchies, on atteint le point de non-retour et le film prend des allures de film catastrophe.

Dans sa fabrication « La nuée » a joué sur plusieurs types d’effets spéciaux, des effets de plateau, des effets de maquillage et des effets numériques. Un équilibre difficile à trouver car les différents effets ne cohabitent pas forcément bien. Pour la seule scène où Virginie blessée au bras est attaquée par les sauterelles qui boivent son sang, il a fallu avoir recours aux trois types d’effets. D’autant que pour cette scène comme pour bien d’autres, le réalisateur voulait éviter le spectaculaire. « La nuée » est une œuvre étrange tant par le sujet qu’elle aborde que par son traitement. L’équilibre du récit entre le réalisme et le fantastique l’un s’intégrant parfaitement à l’autre.
« La nuée » est l’histoire d’une nouvelle façon de vivre avec ses risques et ses contradictions. L’aspect fantastique du film ne néglige pas un regard sur la vie de famille et Just Philippot ne perd jamais de vue que les enfants aujourd’hui seront les adultes de demain. Francis Dubois


« La nuée » un film de Just Philippot. Sortie en salles le 19 juin.


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