« Les enfants du Paradis » doit vous servir de boussole. Le film de Prévert et Carné mettait en scène ce Paris des années Louis-Philippe, ce roi-bourgeois de nos livres d’Histoire caricaturé par Daumier sous forme de poire, un roi qui maniait aussi la répression contre les Républicains et les anarchistes. Le film racontait les saltimbanques mais présentait aussi ce criminel étrange aux mœurs révoltantes pour les biens pensants, Lacenaire, poète et écrivain.
Il a laissé des Mémoires sans doute édulcorées par les autorités après mort sur la guillotine.
Michaël Mention, comme c’est un peu la mode, a pris ce personnage pour en faire une figure – brève – de détective privé. Le chef de la sûreté, Allard, devenu l’ami de Lacenaire lui propose de mener l’enquête sur des meurtres d’enfants décapités post mortem. C’est l’occasion, pour l’auteur, de nous faire visiter ce Paris – hiver 1835 – de la pauvreté, des conditions de travail inhumaines, des taudis et de la pègre qui essaie de résister, à sa manière sans parler des bouges et des bordels de luxe. Les « autorités » ne sont pas exemptes de la corruption qui règne en maîtresse face à des populations dépossédées de leur condition d’humain-es.
En même temps, Mention livre des extraits du livre de Lacenaire pour rendre un hommage appuyé à l’écrivain. Tout en s’interrogeant sur la censure dont il a fait l’objet, notamment « La voix secrète » vraisemblablement rajouté par les censeurs pour rendre le personnage antipathique. Pour cette raison ou pour une autre, c’est ce titre qui a été retenu, « La voix secrète ».
Un polar historique étrange, à l’intrigue politique du côté de la seconde fin, qui fait voyager dans le temps. Pour s’apercevoir aussi – quoiqu’en pense Mention – que Lacenaire est un peu suranné…
Nicolas Béniès.
« La voix secrète », Michaël Mention, 10/18.
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