Quel lien entre Edgar Poe, Guy De Maupassant et Henry James ? Des influences diffuses. Poe, par ses récits fantastiques – par le biais de la traduction de Baudelaire qui a trouvé un alter ego – a ouvert la voie à la fois à Maupassant et à James pour se lancer dans des aventures étranges et pas toujours en phase avec leur manière habituelle d’écrire. 

« Invisibles visiteurs » réunit les trois auteurs, avec des mises en perspective dues à Noëlle Benhamou, Jean Pavans pour comprendre les filiations. Un plaisir de lecture agrémenté par des illustrations de Pancho (pour Poe et James) et celles, tirées de la publication originelle, de William Julian-Damazy, pour Maupassant. La nouvelle de Poe, « L’homme sans souffle » est un premier essai de se servir du fantastique pour souligner les imbécillités des « bonnes mœurs » de Boston, là où est né l’auteur. Les concepteurs ont eu la bonne idée de faire précéder ce texte par un extrait de la présentation de Baudelaire d’Edgar Allan Poe, un des grands textes du poète. Il donne l’impression manifeste de se projeter dans la vie de Poe. Une empathie perceptible. (Traduction Emile Hennequin)

« Le Horla » est une incursion de Maupassant dans un monde qui n’est pas le sien. Il le fait avec une étourdissante virtuosité. Là encore, la bonne idée a été de faire précéder la longue nouvelle par une sorte de prolégomènes, « Lettre d’un fou ». Noëlle Benhamou souligne les différences de tonalité qui font de « Le Horla », un chef d’œuvre. L’origine du titre reste un mystère. Un cas de possession qui peut passer pour la folie. Les critiques n’ont pas manqué de prendre le héros du récit pour l’auteur lui-même.

Henry James, grand lecteur de Maupassant, se saisira de ce thème de la possession pour écrire « Le tour d’écrou ». La nouvelle est entourée d’une note du traducteur, Jean Pavans, d’une préface de Henry James lui-même et d’une postface de Pavans « Quand James dîne avec Maupassant ». Le fantastique lui permet de faire passer l’amour fou d’une jeune femme et d’un petit garçon. Un drame affreux se déroule que les invisibles visiteurs cachent par leur présence/absence. Ils sont nécessaires pour éviter de dire tout en suggérant. Du grand art.

James nous incite à relire « Le Horla » pour distinguer les secrets de cette longue nouvelle, pour apprécier l’art de Maupassant.

Nicolas Béniès

« Invisibles visiteurs », Poe/Maupassant/James, sous la direction de Cynthia Liebow, Editions BakerStreet, 311 pages, 21 euros


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