Ce prénom ancien la rend unique. Un prénom démodé pour une jeune femme née à la fin des années 80, entre Tchernobyl et la chute du mur de Berlin, avec un avenir coincé entre catastrophe et espoir vite déçu, comme elle le fait remarquer.

Elle a été désirée, aimée, fut une très bonne élève et a décidé d’être comédienne. Elle a désormais 30 ans et quelques désillusions. Enfoncée dans son fauteuil, en pyjama confortable, elle revient sur son parcours depuis son enfance jusqu’à aujourd’hui. La génération Y à laquelle elle appartient a connu bien des bouleversements, technologiques d’abord, politiques aussi, qui l’ont un peu écrasée.

Clothilde Aubert a écrit un texte vif, drôle, bourré d’humour. On la suit au gré de ses élans, puis de ses déceptions, des moments où elle n’a envie que de rester devant la télé à ceux des grandes résolutions. Elle a cru à la paix et a découvert que les guerres étaient toujours là avec leur cortège de morts innombrables, elle a cru que les femmes avaient conquis leur place et découvre que le patriarcat domine toujours y compris le monde du théâtre, elle a cru que la vie était géniale. Mais elle a déchanté, et depuis elle procrastine.

Clothilde Aubert, mise en scène par Stéphane Colle qui signe aussi les éclairages, est Yvonne, oscillant des élans au renoncement, de l’engagement enthousiaste à la désillusion. Yeux écarquillés, vissée dans son fauteuil, elle déprime n’ayant qu’une envie, rester devant les séries de la télé à l’abri chez elle. Elle se dit que le monde irait mieux si tout le monde restait en pyjama ! Ce fauteuil elle le fait aussi tourner, s’en extrait, le déplace, crie ses indignations. Puis un jour elle quitte son pyjama protecteur, elle enfile une robe rouge, bleue et or, des escarpins rouges et une couronne pour enjoindre tous ceux de sa génération, qui dépriment, à quitter l’angoisse du « pourquoi » pour se dire « Pourquoi pas ? ». Le spectacle s’achève par la lettre de son grand-père en fin de vie qui trouve les mots qu’il n’avait pas su lui dire auparavant. Peut-être sa tendresse va-t-elle la consoler et l’armer pour repartir au combat de la vie ?

Un spectacle drôle et tendre sur une génération pour qui tout n’a peut-être pas été aussi facile qu’on le dit parfois.

Micheline Rousselet

Spectacle vu en avant-première au Théâtre La Flèche à Paris – Du 29 juin au 21 juillet au Festival off d’Avignon – La Factory aux Antonins, 5 rue Figuière à Avignon, à 18h10 – Relâche les 2, 9 et 16 juillet – Réservations : 09 74 74 64 90 ou www.la-factory.org

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