Le 13 novembre 2015, le journaliste Antoine Leiris est chez lui. Il garde son petit garçon Melvil. Sa femme Hélène est allée à un concert au Bataclan. Brutalement il découvre, par un message téléphonique puis les images de la télévision, l’attentat. La famille de sa femme le rejoint. Commence alors la course à travers Paris d’hôpital en hôpital, l’attente dans l’angoisse jusqu’à la déflagration, Hélène est morte. Malgré la douleur du deuil il lui faut penser au quotidien pour Melvil. Trois jours après l’attentat il publie sur Facebook un texte profondément émouvant « Vous n’aurez pas ma haine », qui sera partagé des milliers de fois et sera suivi en 2016 d’un livre portant le même titre.

Olivier Desbordes met en scène ce texte qui sans éviter l’émotion ne sombre jamais dans le pathos et décrit les étapes qui vont mener Antoine Leiris vers un retour à la vie. Il le dit « je ne pardonne ni n’oublie rien ». Mais pour Melvil il faut que la vie continue, le biberon du matin, le goûter, les lectures du soir. Son père doit apprendre à devenir père et mère, avec le soutien de la famille, des amis et des mamans de la crèche qui l’inondent de bocaux de petits plats pour que Melvil « ait le goût des petits plats préparés par les mamans ». Avec humour Antoine Leiris dit que Melvil, habitué aux petits pots du commerce, les refuse mais lui continue à les accepter comme un gage magnifique de tendresse.

La mise en scène sobre crée l’émotion avec ces tennis abandonnées, ce carré de lumière au sol, comme le corps d’Hélène à la Morgue, contre lequel se colle l’acteur, le son de la petite boîte à musique qui accompagne le coucher de Melvil ou ces flash d’éclairages qui révèlent un corps saisi par la douleur. C’est lumière allumée dans la salle que le comédien lit la lettre célèbre « Vous n’aurez pas ma haine » avant d’en faire un petit avion qu’il envoie dans les rangs du public. Les porteurs de haine n’ont pas gagné. Comme le dit Antoine Leiris : « on ne sèche pas les larmes sur la manche de la colère. Nous ne construirons pas une vie contre eux. Nous avancerons dans notre vie à nous ».

Seul en scène Mickaël Winum porte ce texte lumineux, doux et fort à la fois. Il est bouleversant, passant de la colère maîtrisée à la tendresse infinie, de la douleur au retour à la vie au côté de son petit garçon.

Micheline Rousselet

À partir du 29 septembre au Théâtre Actuel La Bruyère, 5 rue La Bruyère, 75009 Paris – les lundis et mardis à 21h – Réservations : www.theatrelabruyere.com

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