Une sacrée bonne femme cette Mère Hollunder, une grosse dame avec sa robe de tweed, ses trois poules et son magnétophone sur lequel elle écoute Casta Diva, le grand air de Norma. Avec son Jacob l’histoire a commencé de façon étrange. Aux propos salaces qu’il lui a tenu, elle a répondu par « un bon coup dans la gueule, ça soulage et ça fait gagner du temps » puis elle l’a épousé. Il était photographe, elle l’est devenue aussi. Appareil de photo autour du cou et flash en main, elle photographie les jeunes couples, les jeunes filles en tenant des propos insolents et sans filtre sur la vie, l’amour, la tendresse, les relations hommes-femmes, les violences faites aux femmes, la mort aussi. Elle est un concentré de colère contre la misère, l’injustice sociale, la domination des religieux de tout poil et contre la violence. Dans ses propos éclatent sa volonté d’être libre, indépendante, maître de son destin. Elle a appris à dire non et elle fait l’éloge du non.
Jacques Hadjaje, écrivain, dramaturge, metteur en scène, comédien et compagnon des créations de Jean Bellorini depuis 2006, a écrit ce texte tandis qu’il jouait le rôle de Mère Hollunder dans le Liliom, mis en scène par Jean Bellorini en 2013. Quand on a un « petit rôle », il y a des temps morts, Jacques Hadjaje en a profité pour inventer une vie à son personnage !
La mise en scène de Jean Bellorini joue sur un effet de mise en abyme. Après chaque photo que Mère Hollunder réalise, elle se place au pied d’un escalier et parle à Julie, la compagne de misère de « ce vaurien de Liliom ». Ses propos sur l’amour, les violences faites aux femmes, la misère font écho à la pièce de Molnár. Jacques Hadjaje dit qu’il a tenté avec Mère Hollunder de rejoindre un vieux rêve de clown. Il y a de cela quand elle nous raconte Norma, « l’histoire d’une femme qui en chie comme c’est pas possible ». Mais au-delà du rire, l’émotion n’est jamais loin quand elle écoute Casta Diva ou qu’elle évoque son Jacob. Quand à la fin Jacques Hadjaje abandonne faux seins et fausses fesses, c’est à la mort qu’il tient tête et fait un pied de nez, et on rit encore. Même pas peur !
Micheline Rousselet
Du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 15h30
Théâtre du Rond-Point
2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris
Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 44 95 98 21
Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.
Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu