Les spectateurs, placés sur des gradins en vis-à-vis, regardant une scène centrale surélevée et entourée d’une fosse, où une troupe réduite s’efforce de jouer le début d’une pièce qui semble peu les enthousiasmer. Mais surgissent les Six Personnages, et une double action s’engage. D’une part les Personnages interpellent le metteur en scène, lui demandant de se faire auteur, mais contestant ses choix, mettant en acte les débats du vrai et du vraisemblable, de la décence (jusqu’où peut-on aller sur scène ?) et de la violence. Tout en questionnant le théâtre, les Personnages exposent leur histoire et la jouent par bribes pour montrer le « vrai » aux comédiens et au metteur en scène, interloqués, et ce drame social terrible vient susciter l’effroi chez le public.

Marina Hands adapte la pièce de Pirandello en choisissant de réduire le nombre de comédiens autour du metteur en scène. Restent un comédien et une comédienne, le metteur en scène et son assistante. Quatre face à six Personnages ce qui resserre l’action sur une scène clé, donnant plus de force encore aux débats. La nouvelle traduction de Fabrice Melquiot contribue à donner force et contemporanéité à un texte dont les comédiens du Français s’emparent avec leur talent habituel. Thierry Hancisse, Chlothilde de Bayser, Adeline d’Hermy, Adrien Simion, Siméon Ruf sont les Personnages qui réussissent à nous faire prendre conscience de la nécessité de représenter leur drame quand Guillaume Gallienne en metteur en scène est plus vrai que nature, Claire de La Rüe du Can, Nicolas Chupin les acteurs et Coraly Zahonero nous partagent leur stupéfaction devant ce qui se joue et dont ils sont partie prenante.

La pièce de 1921 porte en elle des questionnements d’aujourd’hui, tout à la fois sur les dysfonctionnements familiaux mais aussi sur la nécessité de les représenter, nous rappelant l’importance vitale du théâtre. Si la pièce a choqué à l’époque parce qu’elle rompait avec tous les codes du théâtre bourgeois qui ont largement et souvent été déconstruits depuis, l’adaptation qu’en fait Marina Hands lui rend tout son pouvoir d’interrogation.

Marianne et Dominique Grissolange Leguen

Jusqu’au 7 juillet-mardi à 19h, du mercredi au samedi à 20h30 et dimanche à 15h- Théâtre du vieux Colombier, 21 rue du Vieux Colombier, Paris 6è-Réservation : 01 44 58 15 15 ou comedie-francaise.fr


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