« Un peuple qui a peur ne se révolte pas. J’ai l’impression de vivre avec dix mille keufs à l’intérieur de ma tête, les vrais keufs, les keufs des autres, de mes amis, de mes adversaires… Toutes les propagandes me traversent…J’en ai marre de surveiller ce que je dis sans même avoir le temps de m’en rendre compte »

Ce texte de Virginie Despentes, écrit dans le contexte du confinement lors du Covid et qu’elle a lu à Beaubourg en octobre 2020, a séduit Véronique Ros de la Grange. Ce manifeste qui constate la férocité du capitalisme et la brutalité du monde qui tyrannise les êtres humains et maltraite la planète, nous invite à ne pas renoncer, à ne pas céder à nos censures intérieures, à nous débarrasser de la culpabilité qui conduit à l’impuissance. Rien n’a jamais empêché l’histoire de bifurquer ou de disjoncter. Le texte appelle à résister, à faire corps pour entrer en rébellion et la joie et la douceur peuvent venir à la rescousse de nos insurrections car il doit y avoir du rêve dans la révolution sinon elle ne devient qu’un roulement des dirigeants.

Devant une palissade où s’affichent des images de manifestations, de cordons de police, des affiches lacérées et une banderole « Rien ne me sépare de la merde qui m’entoure », trois comédiennes et un comédien se lancent avec une énergie magnifique dans le texte de Virginie Despentes. Jeunes et plus âgé.es, silhouettes cauchemardesques de performeuses punk vêtues de noir et blanc ou de dandy, maquillages renvoyant au clown blanc et au Joker, il (Jacques Michel) et elles (Véronique Ros de la Grange, Béatrice Graf et Furioza) nous invitent à ne pas renoncer et à la solidarité face à « la merde qui nous entoure » et à la révolution. Les crescendos, la violence, la rage et les leitmotivs du texte trouvent leur écho dans la musique et le chant. La batterie tape fort, la voix de Furioza se fait incandescente. La chorégraphie pousse les corps à s’affronter avant que la douceur ne les rapproche et que les voix deviennent murmures et poésie slammée. Des rubans de gymnastique rythmique et sportive se déploient dans l’espace et passent du blanc au rouge de la révolution.

Un spectacle énergique, punk, différent qui claque.

Micheline Rousselet

Jusqu’au 13 octobre au Lavoir Moderne Parisien, 35 rue Léon, 75018 Paris – du mardi au samedi à 19h, le dimanche à 15h – Réservations : 01 46 06 08 05

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