Richard III n’est pas difforme et dans son apparence, rien ne semble l’apparenter aux cruautés qu’il a commises et commettra pour monter les marches ensanglantées qui le mèneront au pouvoir et à sa perte. Celui qui apparait sur scène est un clown blanc en pyjama rayé.

Jean-Lambert Wild se prend pour Richard III et Élodie Bordas dans sa première apparition en Lady Anne boiteuse et gigantesque, se prend ensuite pour toutes les femmes de la pièce.

Ils sont pris l’un et l’autre dans la spirale de la représentation théâtrale.

Richard III accède au sommet de l’État en détruisant au passage tout ce qui peut faire obstacle pendant que le clown plonge dans le tragique.

Elle, elle se transforme à vue, change de costumes, de tête, de silhouette pour interpréter une myriade de personnages en multipliant les clins d’œil à la pièce de Shakespeare et à la crédibilité de son interprétation. Elle met à tout instant la distance qu’il faut pour qu’à la fois, on y croie et l’on n’y croie pas.

Les deux comédiens (qui se côtoient avec la complicité nécessaire au double-jeu) sont là pour construire leur propre Richard III sans jamais livrer totalement leur secret qui serait de savoir à quel moment ils sont comédiens, à quel moment ils sont personnages.

Mais, en dépit du trompe-l’œil, on est pris dans la tourmente de la pièce et dans la démence de Richard.

Le dispositif scénique n’est pas seulement magnifique, il réserve des surprises, un fond de ballons bicolores ou des alignements de têtes que le farceur Richard III (ou Jean-Lambert Wild) abat une à une dans une partie de chamboule-tout.

C’est toujours inventif, farceur, espiègle sans que jamais la démarche ne verse dans le procédé.

Le travail d’adaptation (le texte de Shakespeare revisité) est acrobatique mais il retombe toujours sur ses pieds. C’est réjouissant, une telle intelligence, un tel humour, une telle fluidité pour restituer le fil de la pièce, une telle virtuosité pour faire se côtoyer le grotesque et la subtilité, la finesse et la plaisanterie potache…

Il faut courir au Théâtre de l’Aquarium applaudir ce « Richard III », un des meilleurs spectacles de ce début de saison.

Francis Dubois

Théâtre de l’Aquarium Cartoucherie de Vincennes Route du Champ de manœuvre 75 012 Paris

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) 01 44 95 98 21 / www.theatredurondpoint.fr

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