Depuis dix ans Aurélie Charon, réalisatrice de nombreuses séries documentaires pour Radio France, met en scène le récit de jeunes gens engagés qui vivent dans des pays en conflit. Comment raconter la guerre à ceux qui ne la connaissent pas, comment ne pas hériter des haines et des traumatismes vécus par les parents, faut-il rester ou partir en exil, comment parler à ceux qui ne nous ressemblent pas ? Les réponses à ces questions, Aurélie Charon les présente en trois chapitres dont le dernier Vivantes a été présenté à Avignon cet été et tourne désormais en France.

Dans ce chapitre la parole est donnée à trois jeunes femmes trentenaires, originaires de Syrie, de Bosnie et d’Ukraine. Oksana Leuta est enseignante, comédienne, mais aussi fixeuse et traductrice pour les journalistes qu’elle accompagne près de la ligne de front en Ukraine. Hala Rajab est la fille d’un opposant au régime syrien qui après plusieurs séjours en prison en Syrie et un blocage de deux ans au Caire a été assassiné alors qu’il tentait de revenir en Syrie pour revoir sa famille. Sous la menace Hala et sa sœur ont quitté la Syrie pour la France. Elle a étudié à Lyon et est devenue scénariste, cinéaste et comédienne. Ines Tanović, née d’un père bosniaque musulman et d’une mère croate catholique, est une historienne de l’art engagée dans de nombreux projets culturels, qui se bat contre les divisions ethniques et a créé il y a cinq ans un lieu d’accueil pour les migrants à Sarajevo.

Aurélie Charon sur scène les interroge. Chaque jeune femme répond en français, raconte son histoire, parle de ses idées. Hala dit de la guerre en Syrie « ce n’est pas une guerre civile, c’est une guerre du régime contre son peuple ». Leurs langues d’origine réapparaissent dans les échanges avec leur famille. Toutes disent la peur, l’accoutumance aux conditions de vie qu’imposent les combats, les dilemmes de ceux qui partent comme de ceux qui restent. Il y a aussi les interrogations : qu’est-ce qui va se passer maintenant, que va-t-on transmettre à nos enfants ?

Les échanges se déroulent sur fond de visuels, des images des villes où elles vivaient, les drapeaux, les portraits des parents, des moments de vie. Depuis une régie installée en bord de scène Gala Vanson envoie les vidéos et dessine parfois dessus, en direct, apportant une note d’humour bienvenue. Enfin la musicienne Emma Prat s’empare de la partie musicale. Des chansons proposées par les trois jeunes femmes, comme une très célèbre chanson de la Libanaise Fairouz, ou pensées par la musicienne donnent à entendre les sonorités, les intonations de leurs langues.

Par les échanges, la vidéo et la musique, le plateau devient ainsi le véritable carnet de bord de leur histoire et c’est passionnant.

Micheline Rousselet

Spectacle vu à l’occasion de l’inauguration du Meta CDN de Poitiers – Tournée : 14 au 18 octobre avec la possibilité de voir aussi les deux premiers chapitres Nos vies à venir et Réuni.es au Théâtre de la Cité Internationale à Paris, dans le cadre du Festival Transforme initié par la Fondation d’entreprise Hermès, 8 et 9 novembre au Théâtre Nanterre-Amandiers, 27-28 novembre au Théâtre de Sartrouville, 2 et 3 décembre au Théâtre de la Croix Rousse à Lyon, 10 décembre à la MC93 de Bobigny, en décembre à l’Institut du Monde Arabe à Paris, nombreuses autres dates en 2026

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