Fin des années 1970 dans une Angleterre en crise, où Margaret Thatcher impose au monde du travail une austérité destructrice, quatre filles vont créer sur la scène musicale une déflagration, qui fut aussi explosive que fugace. Elles s’appelaient Viv Albertine, Ari Up, Palmolive et Tessa Pollit, avaient entre quatorze et vingt ans, vivaient à Londres et venaient de milieux différents, l’une étant fille de la riche Nora Forster, grande amie de Jimi Hendrix, tandis qu’une autre rêvait de faire la révolution en libérant l’Espagne du franquisme. Liées par une rage de vivre et une admiration éperdue pour Patti Smith, elles sont décidées à consacrer leur vie à la musique. Elles se moquent de leur manque d’expérience, la plus jeune veut jouer de la guitare mais n’a pas encore appris. Elles n’hésitent pas devant les excès, comme pisser sur scène, ni devant la provocation en choisissant comme nom de scène The Slits (les fentes). Petites sœurs des Clash et des Sex Pistols, elles veulent être reconnues et réussissent l’exploit d’être le premier groupe au monde à obtenir de leur maison de disques le contrôle total de leur image, ce dont témoigne la couverture de leur premier album Cut, où trois d’entre elles apparaissent en amazones demi-nues couvertes de boue.

Rachel Arditi et Justine Heynemann ont écrit l’histoire de celles qui formèrent l’un des premiers groupes punk féminin, alternant moments intimes et tendres, qui donnent à chacune d’elles sa personnalité et son histoire, et morceaux détonants emblématiques de leur rage de vivre. La mise en scène de Justine Heynemann place les interprètes dans une sorte de hangar meublé de structures métalliques, où sont installés micros et instruments et où brillent des tubes de néons avec le nom de Patti Smith en rouge, le vert du rat de Syd Vicious ou le portrait de Margaret Thatcher. Les six interprètes (Rachel Arditi, Charlotte Avias, James Borniche, Salomé Diénis Meulien, Camille Timmerman et Kim Verschueren) jouent les rôles principaux (les quatre musiciennes, la mère d’Ari et l’amoureux de Viv), plus quelques autres. Multi-instrumentistes, elles, et il, se lancent, avec cette « envie de tout foutre en l’air », dans des prestations musicales formidables, où la batterie et les riffs de guitare se déchaînent, nous renvoyant à des morceaux célèbres des Clash (Should I stay or should I go), de Iggy Pop et bien sûr des Slits avec le fameux Typical girls. Empruntant à leurs personnagesleur audace et leurfougue, les interprètes sont culottées, énergiques, folles et si touchantes, particulièrement Charlotte Avias, en Ari, sautant partout, n’hésitant pas à se dénuder et à hurler sa soif de liberté.

Que vous connaissiez les Slits ou pas, courez voir Punk.e.s et vous finirez comme l’ensemble du public debout tapant dans vos mains, comme dans un concert de rock.

Micheline Rousselet

Jusqu’au 6 avril à La Scala, 13 bld de Strasbourg, 75010 Paris – du mercredi au samedi à 20h30, le dimanche à 15h – Réservations : 01 40 03 44 30 ou www.lascala-paris.fr

Bienvenue sur le blog Culture du SNES-FSU.

Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.

Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu