La comédienne Béatrice Agenin dit que c’est au cabaret qu’elle a eu ses premières émotions en tant que jeune spectatrice. Sa fille, la chanteuse Émilie Bouchereau, alias Mihlo se souvient avec émotion des loges de théâtre où elle jouait enfant. Toutes deux ont imaginé ce petit cabaret où la chanteuse se fait un peu comédienne et où la comédienne chante.

Des lumières de cabaret, Émilie Bouchereau en robe fuseau rouge fendue jusqu’à la cuisse, se lance dans le tube de Peggy Lee Fever, avec sensualité. Béatrice Agenin joue des gants rouges pour mêler sensualité et humour dans Déshabillez-moi. Le ton est donné. Chansons composées par Émilie Bouchereau ou tubes de Barbara ou des Beatles alternent avec Rimbaud, Proust ou Colette. Mais mère et fille ne se cantonnent pas dans leur registre. Béatrice Agenin, qui depuis son passage à la Comédie Française n’a pas quitté les planches et a été récompensée par un Molière en 2020 pour Marie des Poules, ne se contente pas de jouer, elle chante aussi et même elle danse avec un pantin. La comédienne passe de l’émotion d’un poème de Rimbaud au registre coquin de La chose, la chanson de Patachou. L’audition pour Phèdre avec un metteur en scène très « moderniste » la conduit même à rapper la grande tirade de Phèdre (il faut dire que les alexandrins se prêtent fort bien au rap). Émilie Bouchereau joue de sa longue silhouette fine et ses chansons passent de la ballade à l’humour « j’casse la baraque, j’envoie en l’air mes faux airs de trentenaire ».

Aidées par la metteuse en scène Salomé Villiers, avec peu de choses, des paillettes, des lumières, un castelet, une poupée, un pantin, un boa de plumes rouges, elles créent leur cabaret imaginaire. Accompagnées au clavier par Johan Barnoin (en alternance avec Quentin Morant) et à la batterie par Benjamin Corbeil, l’une chante, l’autre joue mais chante aussi et les musiciens se font un peu comédiens à l’occasion.

De ce cabaret qui rend hommage, sans le dire, à la transmission se dégage une émouvante complicité. Et tout est dit quand elles chantent magnifiquement à la fin la chanson de Bourvil « On peut vivre sans richesses presque sans le sou, mais vivre sans tendresse on ne le pourrait pas ».

Micheline Rousselet

Jusqu’au 21 janvier au Théâtre du Lucernaire, 53 rue Notre-Dame-des-Champs, 75006 Paris – du mardi au samedi à 19h, le dimanche à 15h30 – Réservations : 01 45 44 57 34 ou www.lucernaire.fr

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