Françoise Lorente, autrice, comédienne, metteuse en scène avec Morgan.e Janoir, nous raconte sa terrible expérience lorsqu’elle a appris qu’elle avait un cancer du sein triple négatif soit le cancer le plus invasif, le plus dangereux. En voix off, elle commence la narration disant qu’elle avait ouvert un carnet de bord puis l’avait abandonné pour en ouvrir un autre plus tard pendant que, sur un espace de tatamis noir en tenue d’haïkidoka de la même couleur, elle se défend contre des agresseurs invisibles, imaginant ou esquivant des attaques ou les provoquant. Cette chorégraphie où elle alterne mouvements rapides ou lents, révolte ou abandon, symbolise toute sa lutte contre le cancre qui envahit son corps sans qu’elle s’y attende, sans qu’elle comprenne vraiment ce qui lui arrive.
Seule en scène, elle va nous raconter ce parcours du combattant, le sien mais aussi celui de nombreuses femmes. Avec un réalisme glaçant, elle égrène les visites à l’hôpital, les propos détachés, froids de certains soignants qui manquent d’empathie, d’humanité et ne semblent pas avoir conscience du bouleversement que provoque la maladie. Elle interrompt le cours de son récit pour évoquer avec une grande tendresse l’aide apportée par sa famille et sa « belle » qui l’a soutenue tout au long de cette traversée. Son passé remonte à la surface : ses premières règles, l’accident de sa sœur. Elle fait aussi preuve d’humour quand elle raconte comment elle essaie de continuer à travailler comme comédienne en cachant sa maladie.
Françoise Lorente n’évoque pas seulement son parcours mais aussi celui de toutes celles qui cachent leur corps mutilé par peur du jugement de la société. Cette sororité apparaît dans les rapides interviews de femmes malades ou en rémission en voix off mais aussi dans la figure de sainte Agathe de Catane, martyre chrétienne condamnée à avoir les seins coupés pour avoir refusé les avances d’un consul. Présente en fond de scène silhouette vêtue de tulle noire avec une longue chevelure rousse, elle veille sur Françoise Lorente qui l’incarne en se métamorphosant avec des éléments de costume évoquant le drag queen.
Frédérique Moujart
Jusqu’au 16 novembre – Théâtre de la Reine Blanche, 2 bis passage Ruelle, Paris 18ème – vendredi 18 octobre à 14h30, samedi 19 octobre à 20h, mardi 22 octobre à 21h, jeudi 24 octobre à 21h, samedi 26 octobre à 20h, mardi 29 octobre à 21h, jeudi 31 octobre à 21h, samedi 2 novembre à 20h, jeudi 7 novembre à 14h30 et 21h, samedi 9 novembre à 20h, mardi 12 novembre à 21h, jeudi 14 novembre à 21h, samedi 16 novembre à 20h – Réservations : 01 40 05 06 96 ou www.theatredelareineblanche.com
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