Nora et David se lancent dans un dialogue avec leur fille Marion qui, victime de harcèlement au collège et de cyber-harcèlement, s’est donné la mort. Marion n’a rien dit et ses parents n’ont rien vu venir. Le collège les a laissés seuls face au drame, les enseignants se sont tus et les autres parents désemparés ne les ont pas aidés. Nora et David enquêtent, s’interrogent, veulent comprendre, et surtout dire, pour combattre ce fléau qu’est le harcèlement scolaire.

La mère de Marion, Nora Fraisse a apporté son témoignage dans un livre Marion 13 ans pour toujours, que Frédéric Andrau et Valérie Da Motta ont adapté pour le théâtre. Frédéric Andrau signe une mise en scène sensible qui évite avec finesse tout pathos. Sur fond de bruits de récréation, Marion s’avance doucement et lentement sur la scène en fixant les spectateurs au fond des yeux, fantôme fragile de celle qui est morte désormais. La voix de Nora, sa mère, monte de la salle suivie par celle de son père. Ils évoquent le bébé tout doux qu’elle fut, la petite fille qui avait toujours aimé l’école jusqu’au collège, en cinquième, où tout a dérapé. On l’insulte en classe, on se moque d’elle et cela ne s’arrête jamais puisqu’avec le portable les messages haineux et vulgaires la suivent partout et à toute heure. Comme beaucoup d’adolescents dans sa situation, elle ne dit rien à ses parents, s’invente même un faux carnet de correspondance. Comme souvent les enseignants n’ont rien vu. C’est au cours de leur enquête que les parents de Marion découvrent tout cela, les messages immondes sur son téléphone, les professeurs qui ne se sentent pas concernés ou que l’on prie de rester à l’écart, le principal qui préfère qu’on évite d’en parler pour préserver la réputation de l’établissement, d’autres enfants qui n’ont pas osé s’opposer aux tortionnaires par peur d’être eux-mêmes ostracisés.

Toujours présents sur la scène Marion et ses parents se parlent. Nora et David racontent ce qu’ils découvrent effarés et désespérés. Le téléphone est omniprésent avec les bruits de pfut faits par le père quand part un message. Valérie Da Mota est Nora, une mère ravagée par la découverte de ce que sa fille a subi sans que personne ne l’aide. Mais elle comprend aussi qu’il lui faut désormais s’occuper de ceux qui restent, ses autres enfants mais aussi les enfants qui partout en France sont victimes de harcèlement. (Nora Fraisse a d’ailleurs crée une association Marion Fraisse – la main tendue et écrit un guide Stop au harcèlement). À ses côtés Renaud Le Bas incarne David, le père. Nina Thiéblemont, à peine plus âgée que son personnage, incarne une Marion, adolescente rousse à la silhouette longue et menue. Elle a son téléphone greffé à la main comme les adolescents de son âge, elle apparaît douce et fragile, souriante, jolie, de celle dont on n’imagine pas qu’elle pourrait être victime de harcèlement, un fléau qui pourtant toucherait bien plus d’élèves qu’on ne le pense.

Micheline Rousselet

Jusqu’au 23 avril au Théâtre des Déchargeurs, 3 rue des déchargeurs, 7501 Paris – du mercredi au samedi à 21h15 – réservations : www.les déchargeurs.fr

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