Berthe, cent deux ans, a tiré sur son voisin, un avocat, puis a canardé les flics venus l’arrêter. Elle est désormais en garde à vue au commissariat face au Capitaine Ventura, qu’elle a décidé d’appeler Lino quand ce n’est pas Colombo ! Mais Berthe n’est pas une prévenue banale. Elle n’a pas l’air sensible à son statut d’accusée, a la répartie facile, réclame du café, du coca et le Capitaine va aller de surprise en surprise quand elle va décider de lui parler de son lüger, du nazi enterré dans sa cave (mais y est-il seul ?) et de sa vie. La justice n’étant pas toujours là où on l’attend, il irait même jusqu’à éprouver de la sympathie pour cette battante.
L’actrice Josiane Carle a lu le roman de Benoît Philippon paru en 2018 et a écrit à l’auteur qu’elle adorerait jouer Berthe. Le thème du roman lui plaisait, l’écriture aussi. L’humour de Berthe, sa verve que rien n’arrête, sa détermination de femme qui a beaucoup vécu et ne s’en laisse pas conter ne pouvait que la séduire. Elle a adapté le roman et fait appel à Antoine Herbez pour la mettre en scène et lui donner la réplique. Il incarne ce Capitaine Ventura, qui veut croire dans la justice, dans la loi et ramener Berthe à son statut d’accusée. Face à lui Josiane Carle est Berthe, corps fatigué de vieille femme, calme, tenant fermement son sac à main sur ses genoux. Elle parle de sa vie, des hommes qu’elle a épousés, des hommes qui l’ont battue, de sa découverte des écrits de George Sand et de Simone de Beauvoir et elle en conclut « Si elles avaient les mots, moi j’avais les cartouches » ! Elle dénonce aussi cette police qui n’est jamais là quand il faut défendre les femmes et qui a une fâcheuse tendance à arriver toujours trop tard. Un lien fort se crée entre elle et ce flic qu’elle considère comme un gamin. Sur les notes de Summertime, elle lui parle de l’homme qu’elle a aimé. L’émotion rejoint le rire car elle est désopilante cette mamie Lüger, vraie, sincère, libre et comme le Capitaine Ventura, on ne peut s’empêcher de l’aimer.
Micheline Rousselet
Jusqu’au 1er novembre à L’Essaïon, 6 rue Pierre-au-Lard, 75004 Paris – les vendredis et samedis à 19h – Réservations : 01 42 78 46 42 ou www.essaion.com
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