« M.O.L.I.E.R.E »

Le titre en forme d’acronyme (M.O.L.I.E.R.E pour Méli-mélo Oratoire Librement Inspiré d’Errances dans le Répertoire de l’Éponyme) éclaire la scène en lettres lumineuses et l’intention de la troupe : Méli-Mélo parce que s’y entremêlent la vie et l’ œuvre de Molière ; Oratoire parce qu’il s’agit de traverser sa langue ; Librement parce que les comédiens, auteurs de la pièce, usent aussi de la nôtre ; Inspiré parce qu’il y a de quoi l’être ; Errances parce qu’ils aiment comme les acteurs de l’Illustre théâtre se promener là où l’on trouve à jouer ; Répertoire parce que celui de Molière est leur matière première ; Éponyme parce que c’est bien de Molière qu’il s’agit. Ce n’est pas une simple biographie comme on pourrait le craindre mais une véritable œuvre théâtrale mêlant très habilement la vie de Molière et ses œuvres. Les trois comédiens ont fait à six mains un travail exceptionnel d’écriture. Ils ont inséré très adroitement de très nombreux courts extraits des pièces de Molière mais aussi de Corneille et de Racine au récit de sa vie pour retracer tout son parcours. Et cela de façon très maîtrisée, naturelle, fluide et astucieuse. Sans être didactiques et en en jouant, ils s’autorisent même à citer le titre des œuvres, l’acte et la scène des différents extraits. Un magnifique tissage en une heure et quinze minutes en l’honneur de celui qui a refusé d’être tapissier comme son père. Bel exploit.

Elsa Robinne en a fait une mise en scène dynamique, burlesque à l’image de la vie mouvementée de Molière. Tout y est : sa volonté de devenir comédien, la rivalité avec Montfleury et l’hôtel de Bourgogne, les débuts chaotiques en Province après l’échec à Paris, son ascension auprès du roi, les controverses à propose de ses pièces, la censure, sa rivalité avec Lully, son travail de comédien et de metteur en scène… et sa mort. Chaque moment de son parcours est traité comme une véritable saynète dont le jeu emprunte à de nombreux domaines : la danse et la musique, arts chers à Louis XIV, l’interview et les débats télévisés, le reportage sportif, la variété, la farce et même la tragédie que Molière aurait tant voulu écrire et jouer. On sent chez les trois comédiens, tous remarquables, une vraie complicité et un réel plaisir communicatif à jouer. Le public ne peut qu’adhérer à ce spectacle jubilatoire. Etienne Luneau campe un Molière fragile qui doute mais tenace, persévérant et fougueux. Lucas Henaff et Clément Beauvoir, en véritables hommes-orchestres, jouent avec brio et malice de multiples rôles dans une partition d’acteurs comiques.

Ces trois personnages évoluent dans un décor minimaliste constitué de trois chaises et d’un tapis savamment utilisé comme tapis de course, rideau de scène, parure de trône. Ils sont accompagnés tout au long de la pièce par la musique jouée par Joseph Robinne au clavier faisant écho à l’omniprésence de la musique dans les spectacles de Molière et à l’accompagnement des films burlesques.

En cette année Molière, la compagnie du Grand Tigre nous offre c’est un très beau spectacle remarquablement écrit, mis en scène et joué qui s’adresse aussi bien aux adultes qu’aux collégiens et lycéens. Même sans connaître toutes les pièces de Molière, on comprend tout et on a envie de s’y plonger ou de s’y replonger.

Frédérique Moujart

Du 2 au 6 février 2022 au Lavoir moderne parisien, 35 rue Léon. Paris 18- à 19h (15h le dimanche) – Réservation : 01 46 06 08 05 – www.lavoirmoderneparisien.com

Vendredi 25 mars – 20h30- Théâtre Maurice Sand, La Châtre (36) 

Mardi 5 avril à 14h- Collège Balise Pascal – Villemoisson (91)

Jeudi 7 avril à 20h30 – Théâtre de la Clayette (71)

Vendredi 8 avril à 20h30 – Théâtre Clin d’œil, Saint-Jean-de-Braye (45)

Festival off d’Avignon du 7 au 31 juillet – théâtre des Barriques