Clémentine Niewdanski et Elya Birman ont réussi ce petit miracle d’adapter Les travailleurs de la mer, ce gros roman que Victor Hugo écrivit lorsqu’il était en exil à Guernesey, publié en 1866. Plusieurs centaines de pages ramassées en un spectacle d’une heure et quinze minutes pour mieux nous entraîner dans l’héroïque aventure de Gilliatt. Un seul acteur sur scène pour nous raconter à la 3ème personne, son destin tragique.

Victor Hugo brosse d’abord le portrait de cet homme, taiseux et solitaire qui, pour l’amour d’une femme, décide d’aller récupérer la machine à vapeur d’un bateau qui s’est échoué sur les rochers de Douvres, à mi-chemin entre Guernesey et la France. Personne ne s’y risque mais lui, qui n’est même pas marin, y va et passe deux mois, seul sur le rocher, à se battre contre la nature, la mer, le vent, la faim, la soif pour sauver cette machine, ce symbole du progrès.

La présence d’Elya Birman est stupéfiante : habité par les mots de Hugo, il saisit le spectateur dès les premières minutes. Celui-ci est captivé par la voix, envoûté par les intonations. Il ne nous lâchera plus et on le suit dans son infinie solitude entre terre et mer, occupé à déconstruire cette épave pour en sauver le cœur de feu.

La mise en scène de Clémentine Niewdanski construit le souffle hugolien des grands auteurs de la mer, Pierre Loti ou Joseph Conrad. On y voit le bateau jeté sur les rochers, on y entend la tempête, on y retrouve aussi du fantastique avec la pieuvre, animal imaginaire qu’Hugo introduit dans la langue française à cette occasion.

Marc Eigeldinger, poète suisse, écrit dans sa préface du roman de Hugo : « Cette “Iliade à un” est une épopée de l’océan et du progrès. Après avoir vaincu l’impossible cosmique, les obstacles du temps et de l’espace, il se heurte à un autre impossible, celui-là irréductible, celui du cœur féminin, de ses penchants et de ses secrets. »

L’adaptation et la représentation du roman que font Clémentine Niewdanski et Elya Birman sont fidèles à l’esprit de l’œuvre et la rendent accessible à toutes et tous, en particulier à nos élèves.

Marianne Grissolange Leguen

Jusqu’au 17 mars, à 19h du mardi au samedi, à 15h30 le dimanche – Lucernaire, 53 rue Notre Dame des Champs, 75006 Paris – Réservation 01 45 44 57 34 et sur www.lucernaire.fr

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