Août 1914 : la guerre est déclarée. Les hommes sont mobilisés. Les femmes vont devoir remplacer les hommes dans les usines d’armement. Michel Bellier, auteur des Filles aux mains jaunes, nous raconte l’histoire de quatre « obusettes » : Julie (Anna Mihalcea), la jeune fiancée illettrée ; Rose (Elisabeth Ventura) qui a deux enfants à charge ; Jeanne (Brigitte Faure) dont le mari et les fils sont sur le front ; Louise (Pamela Ravassard), la journaliste féministe célibataire, la suffragiste et la seule intellectuelle des quatre. Louise par sa différence va peu à peu les amener à réfléchir et leur montrer qu’une femme n’est pas la moitié d’un homme mais qu’elle peut penser par elle-même et s’affranchir. Les mauvaises nouvelles du front et les conditions de travail épuisantes, dangereuses (la manipulation du TNT, véritable bombe à retardement, leur rend les mains jaunes) et inhumaines les poussent à s’unir contre les chefs et les injustices et à revendiquer le droit de vote des femmes, la protection au travail et l’égalité salariale des hommes et des femmes . Elles vont même oser se mettre en grève.

La mise en scène brillante de Johanna Boyé est particulièrement réussie. Dans un décor mobile, simple et évocateur (structure d’acier surmontée de vitres brisées) du scénographe Olivier Prost, Johanna Boyer enchaîne à un rythme soutenu différents tableaux de la vie des quatre femmes. L’accompagnement sonore et musical de Medhi Bourayou, le jeu des lumières de Cyril Manetta ainsi que les gestes mécaniques et répétitifs des comédiennes, belle chorégraphie de Johan Nus, nous plongent dans la vie assourdissante de l’usine.

Remarquables, les quatre comédiennes nous font partager leurs peines, leurs doutes, leurs joies et leurs espérances. On s’attache à chacune d’elles et on suit avec plaisir et émotion leur évolution. Michel Bellier dresse quatre très beaux portraits de femmes en mettant en lumière leur solidarité, leur amitié malgré leurs différences initiales.

Cette pièce qui est intéressante par sa dimension historique est aussi très actuelle. Malgré des progrès, l’émancipation des femmes et l’égalité salariale ne sont pas encore acquises et restent un combat permanent qui nécessite lutte et solidarité. De plus, la première guerre mondiale a montré l’importance du travail des femmes, ces invisibles, comme l’épidémie de Covid 19 celle des travailleurs et travailleuses de « seconde ligne  ».

Un très beau spectacle plein d’humanité et d’espoir, joué par une troupe d’excellentes comédiennes, à voir absolument.

Frédérique Moujart

A partir du 22 septembre, du mercredi au samedi à 19h. Matinées les dimanches à 17h30. Théâtre Rive gauche. 6 rue de la Gaîté. 75014 Paris. Réservation : 01 43 35 32 31 ou www.theatre-rive-gauche.com

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