Jean-François Derec est seul sur scène. C’est son histoire qu’il nous raconte et il part du début, son enfance à Grenoble. Il a dix ans, Christine en a onze. Elle lui propose de lui montrer ses seins s’il baisse son pantalon. Timide, il refuse et elle lui lance cette phrase énigmatique : « Je sais pourquoi tu ne veux pas me le montrer. Parce que tu es juif et tu as le zizi coupé en deux. ». Cela démarre très fort et la suite s’enchaîne très logiquement. Coupé en deux, mais dans quel sens ? Sa mère est-elle au courant ? Et qu’est-ce que c’est « être juif » ? On est dans la tête d’un enfant, à qui ses parents se sont évertués à ne rien dire de ses origines ni de sa famille entièrement décimée en Pologne. On pense à Romain Gary dans cet art empli d’humour pour dresser des portraits, d’abord celui de sa mère qu’il imite avec cet accent si caractéristique des Juifs Polonais, ses « oï, oï, oï » irrésistibles, cette mère dont l’objectif premier est d’être « komifo », d’apparaître comme une Française, mieux, une Grenobloise ! Ce n’est pas là qu’il trouvera ce qu’il cherche à connaître. « Mes parents sont comme les grottes de Lascaux, pleines de souvenirs mais fermées au public »

Théâtre : Le jour où...
Théâtre : Le jour où…

Jean-François Derec a fait appel pour la mise en scène à Georges Lavaudant, lui aussi Grenoblois, et avec qui il avait travaillé dans les années « 68 ». Ils se retrouvent cinquante ans après, et la mise en scène est à l’unisson du texte, délicate et emplie d’humour. Au fond de la scène, sept petits ballons de vin rouge placés comme les branches du chandelier traditionnel. On n’oublie pas qu’on est dans une famille non croyante mais dont le héros cherche à avoir quelques connaissances sur ses racines !

Jean-François Derec est un conteur magnifique. Il est l’enfant surpris par ce qu’il découvre et qui tente de mettre un peu de logique dans tout cela. Il est la mère avec son accent formidable, les copains séfarades qui arrivent d’Afrique du Nord, avec leurs ressemblances et leurs différences. Avec une fausse naïveté et un humour ravageur il fait vivre un monde. Et surtout il parle de la recherche des origines, si difficile lorsque tout a été détruit et que les survivants ne veulent pas en parler, pour conjurer le malheur parce que c’est trop triste ou pour se placer résolument du côté de l’avenir. On le suit, sourire aux lèvres et émotion au coin des yeux dans ce voyage où la petite histoire éclaire la grande à moins que ce ne soit l’inverse.

Micheline Rousselet

Du jeudi au samedi à 21h

Théâtre de l’Archipel

17 boulevard de Strasbourg, 75010 Paris

Réservations : 01 73 54 79 79

Se réclamer du Snes et de cet article : demande de partenariat Réduc’snes en cours

Puis du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 15h

Théâtre du Petit Montparnasse

31 rue de la Gaîté, 75014 Paris

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 43 22 77 74


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