Librement inspirée de la pièce de théâtre Anatole d’Arthur Schnitzler, Le jeu d’Anatole nous emmène, en cinq saynètes, à Vienne à différentes époques du vingtième siècle. Anatole éternel amoureux, mais de qui ? Des femmes ou de l’amour ?

Incapable de construire une relation amoureuse, il s’interroge, avec son fidèle ami et confident Max, sur la fidélité des femmes. Il séduit, il est jaloux, il se lasse, il quitte. La relation est toujours éphémère et quand il se décide à épouser, on le retrouve au petit matin de ses noces au lit avec une maîtresse. Jamais satisfait il accumule les rencontres amoureuses et séduit dans tous les milieux sociaux, des bourgeoises aux grisettes, des femmes mariées aux chanteuses de cabaret.

La mise en scène d’Hervé Lewandowski, Molière 2019 pour un autre spectacle musical Chance, nous promène grâce à un astucieux assemblage de paravents tournant dans le sens des aiguilles d’une montre, de 1910 aux années quatre-vingt. Les costumes très réussis de Julia Allègre signent aussi le passage du temps. Pour chaque saynète un nouvel univers, un restaurant à la mode où Anatole a décidé de mettre en scène devant Max sa rupture avec une chanteuse de cabaret, la rue pour la scène du cadeau de Noël, où une bourgeoise regrette un amour de jeunesse qu’elle a quitté pour une vie plus bourgeoise, la silhouette des coupoles des églises de Vienne pour les confidences d’Anatole devenu vieux.

Tom Jones signe le livret et les paroles placées sur les musiques d’Offenbach. On retrouve avec plaisir la Barcarolle des Contes d’Hoffmann, ou l’air du Brésilien de la Vie Parisienne, mais aussi de nombreux airs moins connus. Avec de nouvelles paroles, ces musiques accompagnent l’action et nous font passer du comique à la nostalgie, du grave à l’ironie.

Accompagnés par un piano (Sébastien Ménard ou Jonathan Goyvaertz) les quatre comédiens chanteurs nous tiennent sous le charme. Gaétan Borg incarne un Anatole séducteur impénitent, que la nostalgie gagne peu à peu et qui devient touchant lorsqu’il refuse de se laisser entraîner une dernière fois par une toute jeune fille. Yann Sebile est Max, l’ami fidèle, le confident et conseiller. Mélodie prête sa silhouette et sa voix à toutes les femmes, de la femme mariée qu’Anatole hypnotise pour savoir si elle lui est fidèle à la chanteuse de cabaret un tantinet vulgaire, de la bourgeoise qui regrette l’amour qu’elle a laissé passer pour un mariage plus lucratif à la toute jeune fille prête, elle aussi, à tromper son jeune amant pour cet homme aux tempes blanches. Guillaume Sorel enfin se plie à tout pour incarner tous les personnages secondaires mais indispensables à l’action.

On commence par la jalousie et on finit par les regrets de la vieillesse. Entre les deux des amours éphémères. Ce pourrait être cruel, mais avec un peu de distance et des chansons, cela devient tout à fait plaisant.

Micheline Rousselet

Jusqu’au 28 novembre au Théâtre du Lucernaire – 53 rue Notre-Dame-Des-Champs, 75006 Paris – Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h ou 17h – Réservations : 01 45 44 57 34 et sur www.lucernaire.fr

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