Un musicien qui s’est perdu dans le succès se retrouve au chevet de son fils, plongé dans le coma, et se retourne sur les années qui viennent de s’écouler. Fuyant un père plongé dans ses maquettes d’avion, qui n’a pas su le comprendre, une mère trop protectrice et Poupette, la chatte prête à le griffer dès qu’il approche la main, il s’est envolé vers le succès. Devenu star, il a cédé aux démons de la célébrité et aux injonctions de son agent. Il s’est envolé comme Icare, oubliant famille, amis, femme et fils, mais a fini par sombrer dans ce monde de paillettes, d’alcool et de paradis artificiels.
Avec comme compagnes une chaise et une guitare, Nicolas Devort est seul en scène pour évoquer ce parcours fulgurant et cette chute. Enfin il n’est pas seul. Toute une galerie de personnages l’entoure, qu’il fait vivre par ses gestes, ses postures, ses mimiques et les intonations de sa voix. Accompagné par le bip bip régulier du moniteur de surveillance de l’hôpital, allant et venant, se frottant les mains, il est ce père inquiet que ronge sa culpabilité et qui, ne sachant quoi dire à ce fils inconscient, se livre et se dévoile. Il se tourne et devient l’infirmière qui caresse l’enfant inconscient.
Puis le flash-back commence. L’air timide, il se lance dans un solo de guitare pour chanter une de ses compositions lors d’une soirée où un agent le remarque. Amoureux transi sous le balcon de sa belle, il alterne sérénade, bruit des voitures qui passent, chien qui aboie et voisins qui protestent. Faisant revivre son premier concert, il passe rapidement d’un chanteur à l’autre, de la ballade au reggae. Il incarne une présentatrice de télé à la voix sirupeuse à l’écran, qui se transforme hors écran en mégère, pour engueuler l’équipe, un producteur, âme damnée du chanteur, qui le pousse à faire toujours plus, plus de concerts, plus de tournées, plus d’alcool, Icare enfin, prenant de plus en plus d’assurance, se transformant en star capricieuse puis sombrant. Nicolas Devort nous avait régalé l’an passé avec son Dans la peau de Cyrano où il interprétait nombre de personnages, souvent très drôles. Il a souhaité cette fois créer un spectacle où il pourrait chanter en s’accompagnant à la guitare. Il y laisse plus de place à l’émotion jetant un regard un peu désabusé sur la gloire de l’artiste. Faisant vivre toute cette galerie de personnages avec un regard critique, sachant ménager des silences et laisser une place aux chansons, Nicolas Devort nous entraîne dans un tourbillon de sentiments, du rire aux larmes.
Micheline Rousselet
Du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 17h
Théâtre du Lucernaire
53 rue Notre-Dame-des-Champs, 75006 Paris
Réservations : 01 45 44 57 34 ou www.lucernaire.fr
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