Le roman éponyme d’Olivier Guez, Prix Renaudot 2017, s’attache à la « disparition » de Josef Mengele. Cet officier nazi envoya dans les chambres à gaz à Auschwitz près de quatre cent mille hommes, femmes et enfants, s’illustra par son plaisir sadique lors des sélections qui attendaient les déportés à leur arrivée et surtout par ses expérimentations médicales dans le camp qui l’avaient fait surnommer « l’ange de la mort ». Réussissant en Allemagne à échapper à toute inculpation dans l’immédiat après-guerre, il prit sous un faux nom en 1949 un bateau pour l’Argentine où il bénéficia de l’aide de cercles SS. Aidé par sa famille, par d’anciens nazis, par des gouvernements peu regardants ou complices, tantôt sous son vrai nom, tantôt sous une fausse identité, il va alors échapper à toute arrestation et donc à tout jugement, passant d’Argentine en Uruguay, au Paraguay puis enfin au Brésil où il mourra noyé accidentellement.

Mikaël Chirinian a adapté le roman d’Olivier Guez. Dans une mise en scène de Benoît Giros il est seul sur le plateau devant un mur rempli de photographies comme les ultimes souvenirs de la vie d’avant la cavale de Mengele. On entend des bruits de machines comme un rappel de l’entreprise de machines agricoles que possédait la famille Mengele, dont Josef s’est fait parfois le représentant en Amérique latine et dont il a décidé de protéger le nom en épousant sa belle-sœur devenue veuve. On entend aussi un peu de tango comme en écho ironique de cette histoire où l’on cherche vainement la morale. Mikaël Chirinian n’incarne pas Mengele, il raconte sa cavale, il dit « il » pour se tenir à distance de ce monstre qui aurait pu être un homme ordinaire. L’humanité vient du témoignage de Rolf Mengele. Ce fils, qu’il avait eu en 1944 de son premier mariage, à qui on avait dit que son père était mort et qui ne l’avait vu que quelques jours dans son enfance, en croyant que c’était son oncle, viendra en dépit de ses réticences, le visiter en 1977 mais partira très rapidement en constatant que son père restait un nazi impénitent, n’exprimait aucun regret et estimait n’avoir fait que son devoir.

Une réflexion toujours indispensable sur l’impunité et l’absence de responsabilité.

Micheline Rousselet

À partir du 24 janvier à La Pépinière Théâtre, 7 rue Louis Le Grand, 75002 Paris – les vendredis et samedis à 19h, le dimanche à 15h – Réservations : 01 42 61 44 16

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