La Commune a toujours été là dans nos mémoires, avec ses espoirs d’une nouvelle société plus juste, plus libre, où les femmes auraient enfin droit à la parole au même titre que les hommes, plus démocratique aussi et sa fin tragique, qui a sonné le glas de tous ces espoirs.
David Lescot, dont ce n’est pas la première incursion dans l’histoire – on pense à Ceux qui restent où il mettait en scène des souvenirs d’enfants du ghetto de Varsovie- a voulu revenir sur l’histoire de la Commune, un moment d’utopie, de jubilation, d’insolence, de tout ce que l’humanité peut avoir de plus généreux. Pour lui, « la Commune, c’est une affaire de résistance, de révolution et d’improvisation comme le jazz ». Il s’est donc associé au jazzman Emmanuel Bex, maître de l’orgue Hammond, pour en raconter l’histoire. David Lescot a écrit les textes en s’inspirant des grandes journées et des figures importantes de la Commune, telles que nous les livrent les historiens et Emmanuel Bex a écrit les musiques. La Commune a été un formidable creuset d’inventions sociales, une période révolutionnaire où l’énergie des hommes et des femmes était tout entière tournée vers la transformation sociale. C’est donc tout naturellement que les deux artistes ont souhaité un mélange des genres avec un spectacle mêlant théâtre, musique et interprètes aux talents multiples.
Le résultat prend la forme d’un concert assez inclassable, un concert qui parle d’un grand moment historique. La plupart des morceaux sont d’Emmanuel Bex, mais on trouve trace de la musique du Temps des cerises, de la chanson La canaille, que chantait aux Tuileries Rosa Bordas enveloppée dans un drapeau rouge, et de la chanson La semaine sanglante. David Lescot évoque les événements dans l’ordre chronologique, mais il ne les raconte pas comme un historien ou un pédagogue, il les rythme en jazz, accélère, accentue, s’essouffle, ralentit. Sa voix, qui dit les espoirs, les progrès de l’insurrection et son écrasement, devient un instrument de musique qu’accompagne Emmanuel Bex à l’orgue. Le slammeur new-yorkais, Mike Ladd offre sa voix rauque à la colère et à la révolte. Son Anglais donne une dimension internationale à l’espoir de transformation révolutionnaire de la Commune. Géraldine Laurent s’envole en milliers de notes avec son saxophone, tandis que Simon Goubert épouse la violence avec sa batterie. Enfin Élise Caron, à la fois chanteuse de jazz et actrice, fait vivre les héroïnes de la Commune, pas seulement Louise Michel mais aussi Elizabeth Dmitrieff, révolutionnaire russe envoyée par Marx à Paris, qui créa l’Union des Femmes pour la défense de Paris et qui s’illustra vêtue de sa robe rouge pendant la Semaine sanglante.
En mêlant musique et théâtre David Lescot et Emmanuel Bex ont trouvé une forme originale et marquante pour faire revivre ce grand moment de notre histoire, qui avait tout d’une vraie révolution populaire.
Micheline Rousselet
Au New Morning à Paris le 8 septembre, en tournée ensuite
Album disponible sur You Tube music, Apple music, Deezer
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