Théâtre : l'irrésistible ascension

André Toudoux, d’origine modeste, a épousé Julie Champrinet. La mère de celle-ci, une femme du monde, ne manque pas, tout comme sa fille, de le moquer et de l’humilier en permanence. Monsieur Toudoux sera d’abord aux prises avec les douleurs et les « envies » de sa femme sur le point d’accoucher. Il devra ensuite faire face à la volonté déterminée de celle-ci de lui faire « purger bébé », alors qu’il s’efforce de conclure une affaire d’importance avec un général cocu. Il devra enfin tenter de convaincre sa femme qu’elle cesse de s’obstiner à se promener fort dévêtue, alors qu’il tente d’asseoir une carrière politique !

Théâtre : l'irrésistible ascension
Théâtre : l’irrésistible ascension

Le metteur en scène Dimitri Klockenbring a rassemblé trois pièces en un acte de Feydeau ( Léonie est en avance, On purge Bébé et Mais n’te promène donc pas toute nue ). Il les a débarrassées de ce qui était le plus daté, le vaudeville et les portes qui claquent, et a donné à l’ensemble une unité qui apporte du sens. Monsieur Toudoux apparaît comme un petit-bourgeois médiocre qui, face aux humiliations que lui infligent ces femmes déchaînées, se pique de devenir quelqu’un. Sa femme, aussi obsessionnelle que lui et de plus en plus enfermée dans le monde domestique, n’aspire plus qu’à le contredire et se livre à des caprices de plus en plus fous. Si on y ajoute une belle-mère qui hait son gendre, le méprise et ne cesse de parler de ses relations et un domestique affublé d’un défaut de prononciation qui l’empêche de prononcer les consonnes, on entre dans un tourbillon de situations délirantes où s’agite une humanité médiocre et risible, pas si datée que cela !

Le metteur en scène a modernisé le texte. Mais le burlesque est toujours au rendez-vous, accentué par la mise en scène, comme dans la scène où le valet passe l’aspirateur couvrant complètement la voix des personnages et semblant effacer la comédie sociale qui se joue alors. Le rythme rapide déchaîne le rire. Le décor et les costumes évoluent avec l’ascension du héros, appartement de plus en plus bourgeois, pyjama du début remplacé par un costume de futur ministre pour M. Toudoux. Si tout se passe dans l’espace intime, le monde extérieur est incarné par Monsieur Chouilloux, constamment entraîné dans des scènes de plus en plus gênantes. Les acteurs sont formidables. Emilie Cazenave est une Julie Toudoux égocentrique, impudique, capable de délires extraordinaires. Nicolas Lumbreras incarne ce mari veule qui peu à peu se convainc qu’il est promis à un grand avenir, à condition que sa femme ne s’obstine pas à scier la branche sur laquelle il est installé. Bernadette Le Saché en belle-mère démoniaque, Romain Francisco en valet ne prononçant que des voyelles et Yvan Garouel, en colonel égaré dans cet asile de fous, trouvent leur place avec aisance.

Grâce à eux, on redécouvre un Feydeau qui nous fait rire aux larmes de l’individualisme, de l’égoïsme, de l’arrivisme et du désir de paraître de ces bourgeois mesquins, qu’il moque avec une férocité réjouissante.

Micheline Rousselet

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h

Théâtre 13 / Seine

30 rue du Chevaleret, 75013 Paris

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 45 88 62 22

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