Mise en scène Jean Bellorini.
Spectacle en russe surtitré en français avec la troupe du Théâtre Alexandrinski de Saint-Pétersbourg.
Les personnages de «Kroum» n’ont rien pour plaire et pourtant, c’est comme malgré eux qu’ils accèdent à une certaine beauté.
Mais c’est sans doute à Jean Bellorini, à sa très belle mise en scène, à sa très réussie scénographie, à l’interprétation superbe des comédiens de la Troupe du Théâtre Alexandrinski, que les personnages ingrats forcent la main à la sympathie bien que se complaisant dans leur médiocrité.
Revenu d’un long séjour en Europe qui l’a tenu éloigné de sa mère et des ses amis et connaissances, Koum, dès son arrivée donne le ton à son personnage et à toute la pièce : il n’a pas fait fortune, pas trouvé l’âme sœur, tiré aucun profit de son exil et n’a même pas rapporté le moindre cadeau à quiconque. Il est revenu dans le même état de dilettantisme où il se trouvait quand il est parti.
Les personnes qu’il retrouve baignent dans la même petitesse d’esprit où ils étaient avant son départ : une mère végétative aux élans affectifs dépassés, un couple de vieux voisins hostiles l’un à l’autre qui passent le meilleur de leur temps à courir les mariages et les bar-mitzvah pour les agapes, deux filles à marier peu tentantes et d’autres tous à l’avenant…
Si la pièce d’Hanokh Levin commence sur les chapeaux de roues avec des moments aussi drôles que méchants et décapants et si on retrouve tout au long du texte d’autres séquences de la même tenue, «Kroum» prend des allures plus paresseuses ici et là et c’est peut-être ici entre autre, que la mise en scène de Jean Bellorini fait merveille.
Lorsque la pièce amollit son rythme, il ne cherche nullement à relancer le rythme. A contraire, il en respecte la nonchalance. Et mieux encore il n’exploite pas toutes les capacités des situations à faire rire et ne donne pas à tous les personnages qui n’attendent que cela, leur potentiel tant comique que dramatique.
Il sait que derrière son travail de mise en scène qui pour être discret n’en est pas moins efficace, il y a sur quoi il peut compter, pour séduire le spectateur, l’interprétation savoureuse des magnifiques comédiens du Théâtre Alexandrinski, l’utilisation d’un décor coloré, agréable à l’œil et les très réussis costumes de Macha Makeïeff qui n’a pas perdu la main depuis les Deschiens mais qui, ici, a travaillé plus en finesse….
Voilà un spectacle qu’on a plaisir à applaudir à tout rompre et qui compte parmi les meilleurs de ce milieu de saison.
Bravo Monsieur Bellorini et bravo à tous, pour ce moment de bonheur de spectateur.
Francis Dubois
Théâtre Gérard Philipe, Centre dramatique national de Saint-Denis, 59 boulevard Jules Guesde, 93 200 Saint Denis.
Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 43 70 00
www.theatregerardphilipe.com
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