Incandescences clôt la trilogie Face à leur destin d’Ahmed Madani, auteur et metteur en scène. Après Illuminations en 2012 où il mettait en scène neuf « bad boys » de la cité du Val Fourré qui incarnaient des vigiles et Flammes en 2016 où dix jeunes femmes de banlieue assumaient leur désir de liberté, il réunit neuf jeunes de banlieue des deux sexes pour parler d’amour. Pour être le plus juste possible, il a comme pour ses autres spectacles rencontré dans une douzaine de villes une centaine de jeunes entre vingt et trente ans qu’il a amené à se confier et parmi lesquels, il a choisi ses comédien.ne.s.

Quatre jeunes filles et cinq jeunes hommes viennent tour à tour se présenter et raconter avec humour et sans fausse pudeur comment leurs parents se sont rencontrés (coup de foudre, mariage arrangé, foyer polygame voire non-dit) et comment ils ont été conçus. Vont alors s’enchaîner à un rythme soutenu des saynètes dans lesquelles tous les thèmes sont abordés sans tabou : la naissance du désir, la lutte entre la soif de liberté et le poids des contraintes familiales, religieuses, le fardeau de la réputation dans la cité avec l’omniprésence des écrans, la difficultés des relations filles-garçons, la jalousie, la découverte de la sexualité souvent par le porno, le viol, la masturbation, l’homosexualité, le problème du genre…

Tous ces actrices et acteurs non-professionnels disent, dansent, chantent avec une belle énergie et un vrai talent cette envie excitante et angoissante d’aller librement au bout de leurs choix. Toutes les scènes chorales sont particulièrement réussies esthétiquement et vocalement grâce à la collaboration de Salia Sanou et Jérôme Kaboré à la chorégraphie et Dominique Magloire au chant.

En fond de scène, la vidéo de Nicolas Clauss qui montre des portraits de parents et les jeunes enfermés individuellement dans des caisses symbolise les contraintes sociales et familiales, leur solitude et leur mal-être.

Un très beau spectacle qui a le grand mérite de montrer des jeunes de banlieue pleins de dynamisme et de talents, eux qui sont trop souvent absents des scènes ou dont on ne parle qu’en tant que fauteurs de trouble ou délinquants. Leurs questionnements, préoccupations et désirs intimes rejoignent l’universel.

Frédérique Moujart

Jusqu’au 31 mars, du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h – Théâtre de la tempête, Cartoucherie-Route du Champ-de-Manoeuvre, Paris 12ème – Réservations : 01 43 28 36 36 ou www.la-tempete.fr

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