Écrit pour un public d’adolescents, soutenu par le programme Théâtre de la Ville en lycée, le texte de Mariette Navarro les interroge sur leur rapport au voyage, sur l’envie de partir mais aussi sur l’accueil que l’on réserve à ceux qui arrivent, contraints de partir par la guerre ou la misère ou poussés par l’envie d’ailleurs.

Viktor, un jeune homme, s’est invité dans la classe. Il est curieux, bavard et ponctue ses propos de « impeccable ». Il raconte comment il a fui un destin tout tracé auprès de sa famille, dans un pays où il vivait confortablement mais où il est trop question de racines et d’identité nationale. Il a la bougeotte, envie d’aller voir « comment c’est ailleurs ». Lui n’a pas des racines, mais des ailes aux pieds. Il part, s’étonne qu’ailleurs on ne l’accueille pas toujours à bras ouverts. C’est son parcours qu’il raconte aux élèves de la classe, un parcours avec certes des blessures, mais aussi des découvertes et des partages qui les effacent largement.

Le texte, écrit dans une langue littéraire et poétique, est malin. Il sort de l’approche habituelle. Ce n’est pas d’un migrant contraint qu’il nous parle, mais d’un jeune homme qui étouffe dans un milieu miné par les obsessions d’identité et de racines à préserver. François Rancillac a mis en scène ce spectacle écrit pour être joué dans une salle de classe banale, au milieu des élèves. Pas de décor, pas de lumière, juste quelques accessoires et un peu de magie qui suscite des « oh » des élèves.

Eliott Lerner est ce Viktor, curieux, bavard, toujours en mouvement, qui se déplace dans la classe, monte sur une chaise ou même sur le bureau. Il n’a aucune gêne à montrer ses émotions, surprise, colère ou rire, à regarder les élèves dans les yeux, à les interpeller, à les tutoyer, ce que les élèves ont dit avoir beaucoup aimé. Créant une proximité il maintient leur attention et les entraîne dans son monde.

Un débat est organisé ensuite avec les élèves autour des thèmes de la curiosité pour l’étranger, de l’identité comme métissage, de la richesse que représente la diversité culturelle mais aussi de la tolérance et du racisme. Les élèves de la classe du lycée Galilée de Gennevilliers où j’ai pu voir ce spectacle ont, en totale confiance, parlé du parcours de leur famille, de la richesse qu’ils ressentent à être le fruit de cultures différentes, tout comme de questions plus générales autour de l’exclusion.

Démonstration très réussie de la capacité du théâtre à éveiller la réflexion et la discussion en classe.

Micheline Rousselet

Du 11 au 21 juillet dans le cadre du Off d’Avignon à La cour du Spectateur à 17h

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