Si le spectateur s’interroge au moment où deux des protagonistes du spectacle viennent installer sur le plateau deux sièges à bonne distance l’un de l’autre, quand il sait que la pièce qu’il est venu voir porte essentiellement sur le sexe, il a presque aussitôt la réponse. Dès la première scène, qui met en présence dans un peep-show « l’animatrice » et sa cliente masochiste, on comprend que la séance se jouera sans que les partenaires ne s’approchent, même si le dialogue qu’elles échangent, très évocateur, ne mâche pas les mots.

Alors que la nudité, parfois plus ou moins justifiée, était (re)devenue depuis quelques saisons monnaie courante sur les plateaux de théâtre, que certaines fois, des étreintes amoureuses enflammées se déroulaient sous les yeux du spectateur, Alain Gautré prend le contre-pied de cette tendance et travaille à rebours du mouvement contemporain qui a ressurgi des années 1970, de cette violence qui s’exprimait sur scène.

Alain Gautré mise sur le sensoriel avant de miser sur l’émotionnel.
De cette manière le spectateur est en position de rester un être pensant et non pas quelqu’un de réduit à des émotions qui lui seraient imposées de façon frontale.

Malgré un texte souvent d’une audacieuse crudité, il n’y a jamais rien d’obscène dans son spectacle puisqu’il y a symbolisation et non pas production de l’acte.L’écart reste constant entre les situations des personnages et les postures des acteurs.

S’il y a quelque chose de nu dans le théâtre d’Alain Gautré, ce ne sont pas les protagonistes au cours de leurs ébats, mais le plateau dépouillé. Grâce à ce parti pris, « Impasse des anges » devient une comédie noire dont le sexe serait le masque et le moteur burlesque.

Alain Gautré vient d’un théâtre de masque qui est une reproduction du réel mais également une recherche, une invention. Et chez lui, quel que soit le sujet abordé, le clown n’est jamais bien loin.

« L’impasse des anges » est la parfaite illustration de cette veine satirique, ligne conductrice de l’auteur et du metteur en scène. A chacun des moments, les couples se font et se défont, l’espace d’un soir ou l’espace d’une vie.
Ils passent à l’acte, viennent de le faire ou s’apprêtent à le faire…

« L’impasse des anges » fonctionne un peu à la façon de ‘La ronde » de Schnitzler avec des personnages récurrents qui relient entre eux les différents épisodes..

C’est une comédie coquine où on rit de bon cœur de cette humanité qui s’agite pour glaner un instant de plaisir dans des situations où se côtoient l’égarement de l’acte amoureux mais également, le ridicule ou le pathétique qu’il peut engendrer.
Au final, un spectacle savoureux et singulier dont l’apparente légèreté ne masque pas le fond de gravité. Les comédiens sont épatants dans le dosage de leur partition. La charge de l’interprétation n’est jamais débordante.
Francis Dubois

Théâtre Gérard Philipe Centre dramatique national de Saint-Denis 59 Boulevard Jules-Guesde
93 207 Saint-Denis

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) 01 48 13 70 00

www.theatregerardphilipe.com

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