Mathias admirateur passionné de Nougaro, dont il est le sosie, rêve de l’incarner au cinéma. Le temps a passé, il se débat entre vie amoureuse calamiteuse et agent qui le néglige mais il refuse d’abandonner. Il s’accroche à son rêve, comme dans la chanson d’Aznavour à laquelle on pense inévitablement, « se voyant déjà en haut de l’affiche » mais condamné à « courir le cachet et faire n’importe quoi ».
Le comédien Grégory Montel a imaginé ce faux biopic avec son ami Charif Ghattas. Celui-ci a écrit le texte que tous deux mettent en scène et que joue avec brio le comédien.
Grégory Montel est ce quadragénaire à la personnalité complexe en proie à la solitude, qui veut être connu, désiré et refuse de s’avouer vaincu, en amour comme en artiste. Sanguin, colérique, vaincu magnifique, il a une présence sur la scène impressionnante en artiste qui se bat pour ne pas sombrer. Sous les lumières nocturnes quand il chante « sur l’écran noir de mes nuits blanches » il devient Nougaro, passant de Violence à Ah tu verras, tu verras en passant par Je suis saoul sous ton balcon, enchaînant des phrases des chansons de l’artiste. Son accent, sa voix rendent la ressemblance frappante. Il rythme les mots, les jazze, y mêle des mots d’anglais, n’hésite pas devant les rimes approximatives de la poésie nougaresque. Parfois pitoyable, parfois drôle, comme lorsqu’il appelle son agent à trois heures du matin, seul moment où il espère pouvoir échapper au répondeur qu’elle oppose systématiquement à ses colères d’artiste condamné, « par sa faute », à rester inconnu.
Sur cette scène il n’est pourtant pas seul. Il est accompagné par un accordéoniste virtuose, Lionel Suarez aussi auteur de la musique et des arrangements des chansons de Nougaro et véritable partenaire pour l’acteur. Il vibre à l’unisson de ses émotions. L’accordéon semble s’énerver, épouser les colères de l’acteur, ses inquiétudes, ses fanfaronnades ou ses moments de déprime. Lui aussi jazze avec les mots accompagnant celui qui dit « Il y a en moi plus de précipices que de routes vers le bonheur ».
Micheline Rousselet
Jusqu’au 23 avril au Théâtre de l’Atelier, 1 place Charles Dullin, 75018 Paris – du mercredi au samedi à 19h, le dimanche à 15h – Réservations : 01 46 06 49 24 ou www.theatre-atelier.com
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