Celui qui s’annonce sur affiche comme «fantastique» et qui guérit les maladies les plus diverses par l’imposition des mains n’est jamais convaincu de son pouvoir au moment où «il entre en scène».

Mais lorsque sa pratique se solde par hasard par une réussite, le plaisir et la satisfaction sont entiers.

C’est ainsi, avec en tête cette demi conviction, que Frank Hardy sillonne les villages reculés d’Écosse et du Pays de Galles. Avec sa compagne Grâce et son imprésario Teddy, il assure chaque soir le «spectacle» de ses dons exceptionnels, recourant souvent au whisky pour apaiser ses angoisses face à la part de supercherie.

Théâtre : Guérisseur
Théâtre : Guérisseur

A travers quatre monologues dont deux reviennent à Frank Hardy et les deux autres à Grâce et Teddy et qui interviennent en récits croisés, le texte de Brian Friel explore le pouvoir de l’artiste et la solitude de trois êtres unis dans un exercice de supercherie.

En 1986, Laurent Terzieff et Pascale de Boysson , grands découvreurs d’auteurs et de textes rares avaient créé et fait entendre au Lucernaire la voix de Brian Friel dont on dira qu’il est une sorte de Tchekov irlandais.

Le texte, sans réelle intrigue et sans dialogues, est fascinant alors qu’il consiste, dans la mise en scène de Benoit Lavigne, en la simple succession des monologues destinés à puiser dans les mensonges-vérités de Frank Hardy, Grâce et Teddy . Une sorte de témoignages poignants chacun à sa façon, livrés à trois comédiens qui s’acquittent chacun de façon magistrale de sa partition : un Xavier Gallais qui en toute sobriété semble avoir laissé cette fois de côté son souci de performance, une Bérangère Gallot grandiose dans la bonne mesure et un Hervé Jouval en comparse pathétique et flamboyant.

Un décor dépouillé constitué de chaises métalliques, une mise en scène minimaliste, des lumières réduites, auraient pu diminuer la portée de ce beau texte.

Au contraire, cette sobriété qui le renvoie à son essence, porte magnifiquement la pièce qu’on découvre ici pleinement dans l’intimité de la salle «Paradis» du Lucernaire.

C’est peut-être aussi que l’ombre de Laurent Terzieff et de Pascale de Boisson qui sans doute s’en réjouiraient avec nous, accompagne ce moment de théâtre fort de sa fragilité.

Francis Dubois

Théâtre contemporain Lucernaire 53 rue Notre-Dame-des-Champs 75 0006 Paris.

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) :01 45 44 57 34 /www.lucernaire.fr


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