Théâtre : Gens de Seoul

Dans ces deux pièces emblématiques d’Oriza Hirata, le grand dramaturge japonais, on suit le quotidien d’une famille japonaise vivant à Séoul en exploitant une papeterie qui lui assure des revenus confortables. Le premier acte se situe à l’été 1909, un an avant l’annexion de la Corée par le Japon qui, après sa victoire sur la Russie en 1905, poursuit une politique d’expansion coloniale. Sous leurs airs sympathiques, les membres de cette famille se montrent des colons arrogants. Le second acte les retrouve dix ans après, le 1er mars 1919, jour de la naissance du mouvement pour l’indépendance de la Corée. Le climat de la première pièce est plutôt insouciant et c’est à travers les conversations anodines au sein de la famille que transparaît le mépris que ses membres éprouvent vis-à-vis de leurs domestiques et voisins coréens. En 1919 c’est encore à travers leurs conversations, tout aussi faussement anodines, que l’on entend la révolte gronder, une révolte qu’ils sont incapables de comprendre tout comme ils n’ont aucune conscience de la violence de la répression. Convaincus de leur bon droit ils continuent leur vie comme si rien ne se passait, ce qui donne à la pièce un aspect relativement comique.

Théâtre : Gens de Seoul
Théâtre : Gens de Seoul

La marque de fabrique du dramaturge, qui considère le grand cinéaste Ozu comme son père spirituel, est de centrer son propos sur la vie quotidienne pour faire apparaître la toile historique qui la sous-tend. En écrivant ces deux pièces, il avait à l’esprit Les Buddenbrook de Thomas Mann dont il avait été nourri enfant par un père lui-même écrivain. Dans un Japon qui n’a pas fait acte de contrition à l’égard de la Corée et se considère plutôt comme une victime de la guerre en raison de l’usage de l’arme nucléaire à son encontre, les deux pièces avaient été accueillies fraîchement lors de leur création dans les années 1990. Depuis les deux pièces ont été jouées un peu partout dans le monde et leur succès ne s’est pas démenti. Considéré comme l’inventeur du « théâtre tranquille », un théâtre qui met l’accent sur le quotidien plutôt que sur l’exceptionnel, Oriza Hirata réussit à trouver l’équilibre entre les préoccupations quotidiennes et les enjeux sociaux et économiques qui forment l’arrière-plan historique. Interprétées en japonais, séquencées par de nombreuses entrées et sorties ces deux pièces sont l’occasion de découvrir un auteur japonais contemporain majeur.

Micheline Rousselet

Gens de Séoul 1909, le mardi 8 et le vendredi 10 novembre à 19h30, le mercredi 9 à 20h30

Gens de Séoul 1919, le samedi 12 et le lundi 14 novembre à 20h30, le dimanche 13 à 15h

Théâtre de Gennevilliers

41 avenue des Grésillons, 92230 Gennevilliers

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 41 32 26 26

www.theatredegennevilliers.com

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