Camille de la Guillonnière, dirigeant de la Compagnie « Le temps est incertain mais on joue quand même ! » (quel joli nom pour une compagnie théâtrale) a choisi de présenter le célèbre roman de Balzac. Bien qu’écrit en 1834, celui-ci trouve un écho dans la société d’aujourd’hui, où bien souvent l’appétit pour l’argent touche à la gloutonnerie. Balzac y dresse le portrait d’une jeune fille provinciale dont le père, dépourvu de sentiments sauf l’amour de l’argent, ne pense qu’à sauter sur tout ce qui peut l’enrichir et pour qui l’autre n’existe que s’il peut lui apporter un profit financier. D’une avarice monumentale il fait vivre sa maison dans une quasi indigence et ne pense qu’à éviter les dépenses. Eugénie sa fille va, par amour, se dresser contre son père et refuser le diktat de l’argent, révélant une grandeur d’âme qui tranche avec la bonne société de Saumur. Elle a compris les lois du commerce, mais refuse de s’y soumettre.

Théâtre : Eugénie Grandet
Théâtre : Eugénie Grandet

Camille de la Guillonnière ne fait pas une adaptation du texte mais le porte sur le plateau. Le texte n’est pas réécrit, il est juste un peu coupé et surtout, il n’y a pas de distribution de rôles. Tantôt en solo, en duo, en trio, quatuor, quintet et même sextet, les acteurs (Hélène Bertrand, Lara Boric, Erwan Mozet, Pélagie Papillon, Charles Pommel et Lorine Wolff) se volent la parole pour nous livrer l’histoire d’Eugénie, gardant du roman ses péripéties et quelques belles descriptions. Parfois une chanson entonnée doucement en chœur accompagne l’envol de l’imagination du spectateur qui se laisse emporter par cette histoire. Il entend la langue de Balzac décrivant, non sans humour, cette société provinciale toute en mesquineries et en calculs. Le dispositif scénique choisi lui permet d’imaginer ce père Grandet, ogre carnassier qui ne pense qu’à l’argent, et y sacrifie la vie de sa famille.

Une façon originale de présenter un classique, loin des lectures par un acteur ou une actrice seul.e en scène qui fleurissent sur les scènes parisiennes. Sortant de la partition chorale à la fin pour être incarnée par une actrice, Eugénie acquiert toute sa grandeur, refusant le monde que lui a choisi son père, un monde où l’amour compte peu et où l’argent est devenu une fin. Par son choix elle tend un miroir à notre époque, où comme au temps de Balzac, « l’argent domine les lois, la politique et les mœurs » et par là-même elle invite les spectateurs à s’interroger sur les leurs.

Micheline Rousselet

Du mardi au samedi à 20h, dimanche à 16h, relâche le lundi

Théâtre 13/ Seine

3O rue du Chevaleret, 75013 Paris

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 45 88 62 22


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