Isabella vit avec son fils Miquélé, un jeune homme simple d’esprit, gentil mais imprévisible, avec lequel elle a un lien fusionnel. Avec lui elle mène une vie simple, ponctuée par les courses, le linge à ranger, les mots croisés, la confection du café. Leur quotidien se trouve bousculé par l’arrivée de Sandra, la sœur de Miquélé, partie brusquement dix ans auparavant et qui n’a plus donné de nouvelles depuis. Elle revient parce qu’elle va se marier. Elle veut dire des choses à sa mère mais il y a entre elles tant d’incompréhensions, de ressentiment, de colère et surtout il y a Miquélé.
Le jeune auteur Fabio Marra souhaitait dans cette pièce, qui a eu un franc succès dans le Off d’Avignon cette année, parler du lien familial, du besoin que nous avons de faire des choses ensemble et des difficultés qu’il y a parfois à les faire. Sans pathos ni lourdeur sa pièce nous interroge sur un certain nombre de questions. Que sommes-nous prêts à sacrifier par amour ? Qu’est-ce qu’être normal ? Miquélé ne l’est pas, il est malade selon Sandra, ce que refuse d’admettre sa mère. Mais s’il est vrai qu’il a un comportement d’enfant, il est gentil et a le souci des autres. Et puis où s’arrête la normalité ? Sandra l’est-elle quand elle voudrait effacer de sa vie ce frère dont elle a honte ?
Fabio Marra a réussi à s’entourer d’une distribution remarquable. Il faut d’abord souligner sa performance dans l’incarnation de Miquélé, cet homme resté un enfant. Il a les gestes, les mimiques, les crispations du visage d’un handicapé. Il agace, fait rire parfois mais il nous touche aussi. Catherine Arditi est parfaite en mère énergique, qui s’est cantonnée aux tâches domestiques pour se consacrer entièrement à son fils et excuse tout quand il s’agit de le protéger. Mais elle a aussi toute la complexité du personnage, autoritaire, entêtée et cuirassée dans une apparente froideur vis-à-vis de sa fille. Sonia Palau est Sandra, qui tente de résister à l’amour envahissant de sa mère pour Miquélé. Elle bascule avec finesse de la colère à la fragilité, de la rancœur à la douleur, du rejet à l’acceptation. Floriane Vincent apporte à la pièce la touche de drôlerie, de naïveté et de fraîcheur qui permet un subtil équilibre entre gravité et émotion.
Il est rare que le théâtre aborde la question du handicap et des conséquences que la situation a sur la famille du handicapé. Fabio Marra l’a osé et grâce à une distribution remarquable, il réussit une pièce qui a la complexité de la vie avec de la douleur, du rire et de l’émotion.
Micheline Rousselet
Du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 15h
Petit Montparnasse
31 rue de la Gaîté, 75014Paris
Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 43 22 77 74
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