Quatre dames d’un certain âge sont assises prenant le thé dans un jardin. Aux trois amies s’est jointe une femme, Mrs Jarrett, qui passait dans la rue et qu’elles ont invitée à les rejoindre. Elles parlent de choses et d’autres, du dentiste, des séries qu’elles regardent, des oiseaux et des chats. Elles ont l’air de petites dames insignifiantes, mais on devine peu à peu l’épaisseur de leur existence dans le creux des bavardages. Dans leur dialogue arrivent des choses que l’on dit sans y penser et pourtant si révélatrices de la vie, de la solitude des personnes âgées. Et puis il y a Mrs Jarrett, annonciatrice des catastrophes écologiques qui arrivent : l’épuisement des ressources naturelles, la faim des uns et l’excès de consommation des autres, la soif des uns et le trop d’eau des autres, les marchés financiers qui spéculent sur les bateaux, les canoës et autres kayaks, le développement immobilier et les incendies qui font rage.

Théâtre : Du ciel tombaient des animaux
Théâtre : Du ciel tombaient des animaux

On ne connaît guère en France Caryl Churchill, l’autrice de ce texte. Elle a quatre-vingt ans et ce texte est très récent. Après avoir surtout écrit des textes féministes, son théâtre s’oriente davantage sur des pièces avec un enjeu social et politique, mais toujours avec ce style très particulier où la langue épouse le désordre du monde, surfant du banal au cauchemardesque, du réalisme à l’imaginaire fantastique. Les propos restent parfois en suspens, une part d’inconnu se dévoile au détour d’une phrase et dans l’effroi des catastrophes annoncées par Mrs Jarrett se cache de l’humour : l’apparition d’un Musée du Déluge, de conseillers en chagrin et le remboursement des masques à gaz par la Sécurité Sociale !

Sur fond de décor de jardin dessiné au fusain, Charlotte Clamens, Danièle Lebrun, Geneviève Mnich et Dominique Valadié, théière au pied ou mug en main, sont assises sur des chaises de jardin face aux spectateurs. Leur jeu subtil fait ressortir ce qu’a de vive, de déconcertante parfois, leur conversation. Régulièrement la lumière s’obscurcit et Dominique Valadié (Mrs Jarrett), s’avance au devant de la scène, calme, déterminée pour décrire avec distance et presque désinvolture la catastrophe qui arrive. On est saisi par l’étrangeté de la situation. À l’arrière-plan les trois vieilles dames assises calmement tandis qu’au-devant de la scène, telle un observateur détaché, Mrs Jarrett décrit un monde qui tend de plus en plus à s’éloigner de la science-fiction, si l’on pense aux incendies en Australie ou à la montée des eaux. Quatre interprètes magnifiques pour sublimer les propos et la langue de Caryl Churchill.

Micheline Rousselet

Du mardi au samedi à 21h, les dimanches à 15h30. Relâche les lundis et le 14 janvier

Théâtre du Rond-Point

2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 44 95 98 21


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