C’est l’histoire d’un pianiste qui prépare le piano du maestro, il le bichonne, l’astique. Mais ceci n’est qu’une première version. Pour la seconde, il va frapper les trois coups comme aucun showman ne l’a jamais fait en faisant exploser des sacs en papier. Pour la troisième version il explorera tous les métiers possibles au service de ce piano, blanchisseur de touches, testeur de tabouret, accordeur, tourneur de pages, chauffeur de piano. Plus tard il rajoute un clavier ou découvre que les touches du piano ont disparu. Que d’aventures pour un pianiste !

Depuis les années 1970, à côté de ses interventions en tant qu’acteur au service de pièces écrites par d’autres, Jean-Paul Farré nous a habitués à ses spectacles en solitaire qui lui ont valu le Molière du théâtre musical en 2010. C’est lui qui nous propose ce récital aussi déglingué que foldingue. Des situations burlesques, un texte prétexte à tous les jeux de mots et jeux sur les mots, tout est délicieusement loufoque. La mise en scène de Stéphane Cottin se met à l’unisson de l’Auguste qui occupe la scène : un décor en noir et blanc de partitions où les notes se mettent à dégouliner quand démarre l’orage. Quant au pianiste il saute d’un bloc de touches au sol à l’autre comme sur les pierres d’un gué, quand il ne se met pas à nager sur son piano ou ne se convertit pas à la pêche ! Comme dans un seul en scène l’important c’est le début pour accrocher le spectateur, que le milieu n’est pas très important, alors autant aller directement à la fin !

Avec sa couronne de cheveux blancs en désordre et sa queue de pie, Jean-Paul Farré joue du piano, fort bien d’ailleurs. L’œil rieur, l’air moqueur, il évoque le calvaire du piano martyrisé par les enfants dont les parents croient au génie, il ouvre des yeux comme des billes devant ce piano aux touches disparues, il soulève ses cheveux pour se lancer dans une interprétation où on ne sait plus s’il s’agit d’un concerto pour la main gauche et si on peut faire passer sa main droite pour une gauche ou l’inverse. Un clown qui demande « dessine-moi un piano, je l’apprivoiserai » et qui y réussit fort bien.

Micheline Rousselet

Jusqu’au 12 novembre au Studio Hébertot, 78 bis boulevard des Batignolles, 75017 Paris – du jeudi au samedi à 19h – Réservations : 01 42 93 13 04 ou www.studiohebertot.com

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