Au fin fond de la Pologne, au début du XXème, un homme semble se cacher dans une masure. Guérisseur célèbre, effrayé par ce don mystérieux dont il ignore l’origine, il a fui le succès dans cet endroit isolé. S’adressant au médecin qui le cherche et aux deux femmes de sa vie, il soliloque, se souvient de ses interrogations, de son empathie avec ses malades et de son incapacité à essayer de transmettre son talent à ce jeune homme « au visage d’ange » qui le suivait avec passion.

Elizabeth Bouchaud, qui a fait de La Reine Blanche « la scène des arts et des sciences » a écrit ce texte bienvenu en ces temps de pandémie. Les médecins ont bataillé contre le virus, mais aussi entre eux. Il y avait ceux qui avaient trouvé LE remède et refusaient d’entendre les preuves du contraire que leur apportaient certains confrères, les politiques qui imposaient le port du masque après avoir dit qu’il ne servait à rien. La polémique a fait rage. Un point a tout de même récolté l’adhésion du plus grand nombre, la confiance dans les services d’urgence et l’empathie dont ont su faire preuve les soignants. C’est de cela que parle la pièce. Le personnage de la pièce dit « Moi les gens qui allaient crever, ça me donnait envie de les prendre dans mes bras, de leur donner de la chaleur, de leur donner mon corps et ma vie ». Le personnage s’interroge, s’effraie de ce don qu’il ne comprend pas, arrivé comme une révélation. Il tente de fuir avant de retrouver sa place d’homme parmi les autres et de faire ce qu’il peut.

Dans le décor misérable de la masure où il se terre, Grigori Manoukov est ce guérisseur inquiet, traqué, hirsute. Ne sachant expliquer son don, il se refuse à transmettre. Par peur d’échouer il fuit une mourante qu’un médecin lui demande de tenter d’aider. On sent enfler sa panique que n’apaise même plus le souvenir des femmes aimées ou des malades qu’il a guéris. Une des gnossiennes d’Erik Satie, jouée à l’orgue et déréglée, évoque la tentation mystique du personnage avant de retrouver sa grâce à la fin accompagnant l’apaisement du personnage.

Micheline Rousselet

Théâtre de la Reine Blanche – 2 bis Passage Ruelle – 75018 Paris – Réservations : 01 40 05 06 96 – Dates et horaires à préciser lors de la réouverture des théâtres – Juillet 2021 : Avignon – LaReine Blanche

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