Anne Le Guernec met en scène le texte de Nathalie Kanoui librement inspiré de Crimes de femmes d’Anne-Sophie Martin et de Brigitte Vital-Durand. Laura, Leni et Simone sont trois femmes incarcérées pour avoir commis ou participé à des crimes. Entre les salles d’audiences et leur cellules nous sont révélés les vies terribles et le cheminement psychologique de ces femmes tellement humaines qui ont tué pour échapper à l’insupportable dans des contextes sociaux épouvantables. Au tribunal comme en prison se joue le théâtre de ces drames. Meurtrières, elles ont dû mener un combat pour qu’au-delà de leur acte effroyable et irréversible, éclate la vérité qui les libère même si c’est au prix fort de la prison.

La force de la mise en scène tient dans une mise en espace très réussie dans laquelle les trois actrices toutes formidables évoluent avec une remarquable fluidité passant alternativement du rôle de prisonnières à celui d’avocates. Elles sont appuyées par les lumières de Clara Pacotte et la réalisation sonore de Frédéric Prado qui soulignent finement leurs différents états d’âmes. Trois bancs nous font alternativement passer de la prison où s’échangent moments de complicité, d’intimité ou de conflits entre les condamnées à la salle de tribunal où les faits sont implacablement racontés dans toute leur froideur et leur horreur. Nous est montrée également la difficulté des avocates à les faire parler. La scène dans laquelle Simone (formidable Josette Stein) décrit le découpage de son mari nous met en position de spectateur qui assiste au procès, traversé à la fois par l’effroi de l’acte, le rire que ce témoignage provoque et nous met à distance du tragique de la scène. Simone, Leni (Félicité Chaton) ou Laura (Nathalie Kanoui) sont comme ces tragédiennes qui, pour ne plus subir une vie impossible, se sacrifient par amour d’être chers à protéger. Sortir du mensonge de l’emprise et de la violence masculines par cet acte irréparable est pour elles la seule issue et nous interpelle. Comment des femmes qui donnent la vie peuvent-elles en arriver à donner la mort de façon aussi mûrement réfléchie et déterminée. La question est posée et elles nous en donnent leur implacable réponse.Voilà notre vie, nous en payons le prix fort. Êtes-vous bien certain.e.s de pouvoir nous juger ?

La pièce aborde la violence faite aux femmes, leur vie en prison et aussi parfois leur peur d’en sortir et de recouvrer la liberté après avoir été enfermées par leur conjoint ou père tous tyrans .

Une très belle prestation théâtrale qui nous interroge et un spectacle d’une grande force qui nous émeut et nous subjugue.

Frédérique Moujart

Jusqu’au 29 novembre, les mardis, jeudis à 19h et les samedis à 18h – Théâtre La Reine Blanche, 2 bis Passage Ruelle, Paris 18ème – Réservations : 01 40 05 06 96 ou reservation@scenesblanches.com

Bienvenue sur le blog Culture du SNES-FSU.

Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.

Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu