Cookie Mueller a fait beaucoup de choses dans sa vie. Elle se voulait surtout écrivaine, mais a fait tous les métiers, de conseillère dans une société de crédit à animatrice de Bar-mitzvah, (sans être juive !), de critique d’art à gogo danseuse et actrice. Elle a vécu à cent à l’heure une vie ponctuée de traversées des États-Unis, de road trips psychédéliques, d’alcool et de drogues. Elle a eu un fils, qu’elle promenait dans un seau à l’arrière de son vélo, les cheveux collés de bonbons et de bâtonnets de crème glacée. Elle a été photographiée par Nan Golding, a rencontré toutes les célébrités de la contre-culture des années 70 et 80 et a été actrice dans les films transgressifs d’avant-garde de John Waters. Se déclarant porte-parole des laissez pour compte, esprit rebelle jusqu’au bout, elle a longtemps joué avec la mort. Mais, comme tant d’autres en ces années-là, le sida l’a attrapée en 1989. Elle avait quarante ans.

Justine Heymann et Éléonore Arnaud ont adapté le livre de Cookie Mueller Traversée en eau claire dans une piscine peinte en noir. La metteuse en scène Justine Heymann avait été séduite par la fougue de la comédienne Éléonore Arnaud et cherchait un texte à lui confier. Celui-ci lui a semblé fait pour ce tempérament de feu. La comédienne va chercher les spectateurs sur le trottoir, les entraîne dans son tourbillon, se déchaîne en Robin des Bois détruisant le travail de son patron raciste, revêt une robe ultra-courte à paillettes vertes et se mue en gogo danseuse. Les moments de folie alternent avec des moments de douceur, comme à Positano où, vêtue d’une longue robe de plumes légères, elle épouse un bel Italien et chante Ti amo, et des moments de tristesse comme celui où, vêtue de noir mais toujours sexy, elle lit la dernière lettre de son ami avant qu’il ne meure du sida. La comédienne habite ce personnage qui ne cessait de se mettre en scène, mêlant le vrai au faux. A ses côtés le musicien Valerian Behar-Bonnet (en alternance avec James Borniche) joue de la guitare, chante avec elle et lui donne parfois la réplique avec un humour décalé. Ils entraînent le spectateur dans le parfum de l’époque avec le bruit des rues, des voitures sillonnant les autoroutes, des coups de feu, le rire d’un petit garçon et les chansons, celles des Stones et des Doors.

Portrait d’une femme libre juste avant l’arrivée du sida, qui a fauché les jeunes comme les balles d’une guerre et tué une bonne partie de cette contre-culture.

Micheline Rousselet

À partir du 8 décembre au Théâtre de la Huchette, 23 rue de la Huchette, 75005 Paris – du mardi au samedi à 21h – Réservations : 01 43 26 38 99 ou theatre-huchette.com

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