Théâtre : Cadres noirs

Il s’appelle Alain Delambre. Il était un brillant DRH jusqu’au jour où, à la faveur de la reprise de son entreprise par un groupe belge, il a été licencié. La cinquantaine passée, les offres d’emploi n’abondent pas. Sa femme et ses filles le soutenaient, mais il ne supportait plus le chômage. Il a fini par accepter un petit boulot où il met en carton des médicaments pour un salaire de misère jusqu’au jour où, au « coup de pied au cul » que lui a donné son contremaître, il a répondu par un « coup de boule ». Licencié, il désespère et là, miracle, un chasseur de tête le recrute. Il doit mener un test diabolique pour choisir parmi cinq cadres celui qui conservera son poste. Ce sera celui qui aura les nerfs assez solides pour mener à bien le licenciement de 2400 salariés de l’entreprise.
« Cadres noirs » est un polar de Pierre Lemaitre. Comme dans « Au revoir là-haut » qui a eu le Goncourt en 2013, l’auteur y crée des situations fortes où les hommes se débattent pour conserver leur humanité, leur dignité, leur force morale dans un moment de crise. On reçoit son écriture comme un coup de poing et pourtant dans cette tragi-comédie humaine, l’humour a toujours sa place.
Luc Clémentin, qui avait mis en scène la pièce en alexandrins de Frédéric Lordon sur la crise financière, « D’un retournement l’autre », s’est tout naturellement intéressé à ce polar de Pierre Lemaitre. Il y trouvait le même besoin de réfléchir à ce monde malade d’un capitalisme brutal et cynique. Une phrase de la pièce évoque bien l’engrenage auquel peut conduire le chômage de masse. Á sa femme qui lui disait « Je m’en fous d’être pauvre, mais je ne veux pas être sale », le héros répond « C’est le système, pas les chômeurs, qui est sale ».

Théâtre : Cadres noirs
Théâtre : Cadres noirs

Luc Clémentin est Alain Delambre. Dans la petite salle où les spectateurs sont autour de lui, il leur raconte son histoire. Il se lève, il s’assied, il marche. Il évoque ses doutes, son désespoir, ses espoirs aussi. Il allume parfois un écran où s’affichent des mails, l’organigramme de l’entreprise, les modalités prévues de l’opération de sélection. Seul un batteur, Olivier Robin, dialogue avec lui. Sa musique renvoie au désordre qui habite l’esprit du héros, à son désarroi et à la violence d’une société qui marche sur la tête, où les entreprises n’hésitent pas à exercer un chantage à l’emploi ignoble.
Courez entendre ce texte. Dans la bouche de Luc Clémentin, il a une vérité et une force de vie formidable.

Micheline Rousselet

Samedi 12 et samedi 26 mars à 20h30, dimanche 13, 20 et 27 mars à 17h, vendredi 18 mars à 16h30 et 20h30
Théâtre de la Girandole
4 rue Edouard Vaillant, 93100 Montreuil
Réservations : 01 48 57 53 17

Vendredi 1er avril à 19h et samedi 2 avril à 20h30
ECAM-Théâtre du Kremlin-Bicêtre
2, place Victor Hugo, 94270 Le Kremlin-Bicêtre
Réservations : 01 49 60 69 42

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