« Barbara (par Barbara) »

Élégante en robe et escarpins noirs, Marie-Sophie Ferdane, debout comme pour une rencontre avec un journaliste ou assise sur un canapé, offre sa voix à « la longue dame brune » pour un portrait plein de finesse à partir des interviews et lettres de la chanteuse. Olivier Marguerit ébauche, par de délicates ponctuations au piano, un dialogue avec l’actrice qui le regarde parfois avec un sourire complice. Jamais elle n’imite la voix de Barbara, mais elle adopte des gestes qui la rappellent, joue de l’éloquence de ses mains, glisse avec grâce ses cheveux derrière l’oreille. On retrouve la scansion, le regard direct, la façon de dire « je ne sais pas », le rire et l’ironie de la chanteuse.

Conçu par l’autrice et réalisatrice Clémentine Deroudille et l’écrivain Arnaud Cathrine, le spectacle présente une femme qui se veut non pas chanteuse mais « femme qui chante », contrôlant ce qu’elle veut bien dire et révéler. Elle reconnaît qu’elle aime plaire mais ne veut pas être réduite à un archétype de femme belle et mystérieuse. Si elle ne veut pas parler aux journalistes avant de chanter c’est pour rester concentrée, aussi exigeante sur sa tenue de scène que sur le piano qu’elle exige. Ironique avec le journaliste qui cherche à pénétrer son intimité ou pose des questions qui n’ont pas de sens, elle révèle la peur et le délice que représente le fait de chanter en public. Ses lettres révèlent une femme passionnée, sensuelle qui répète « ce sont les hommes qui m’ont faite », mais avoue qu’elle n’est pas faite pour être une épouse.

Marie-Sophie Ferdane, aussi blonde que son modèle était brune, offre un très beau portrait de Barbara avec son intelligence, sa rigueur polie mais aussi sa vulnérabilité, et surtout son amour de la chanson et du public. Elle est magnifique.

Micheline Rousselet

Spectacle vu dans le cadre du Festival Les Singulier.es 2024 au Cent Quatre à Paris – Tournée en construction