Quoi de mieux qu’une brasserie pour observer les hommes et les femmes, écouter leurs dialogues, percevoir leurs mesquineries, leurs désirs, leurs angoisses, surtout quand on le fait en compagnie de Maupassant.

Théâtre : Au café Maupassant
Théâtre : Au café Maupassant

À la suite d’une commande de France Culture Marie-Louise Bischofberger a souhaité adapter à la scène des nouvelles de Maupassant. Parmi les plus de 400 nouvelles qu’il a écrites, elle en a sélectionné huit, dont elle a gardé le texte original. Elle les a seulement agencées, avec beaucoup d’intelligence, pour créer une dynamique et des correspondances entre les personnages, comme dans une série. Cela nous rappelle que Maupassant livrait ces courtes nouvelles semaine après semaine aux journaux qui les publiaient. À travers les monologues et les dialogues vifs et nerveux, ironiques ou cruels que la metteuse en scène a retenus, apparaît la vision pessimiste des relations humaines qu’a Maupassant. Chez lui il n’y a guère d’amour heureux, le mariage tue l’amour, les hommes entretiennent des cocottes, les femmes se vengent, la jalousie peut conduire à la folie et l’argent corrompt les relations les plus intimes. Si la tragédie affleure parfois, elle est tenue à distance, le comique est lui bien présent et souvent grinçant.

Le spectacle est présenté dans la petite salle du Poche où sont disposés des petites tables avec des chaises et où l’on peut boire un verre. Un homme est attablé devant un bock de bière, livre à la main. Comme les spectateurs il observe la petite comédie humaine qui se joue devant lui avec l’arrivée de clients, les acteurs, qui vont jouer leur partition. Un homme l’a rejoint, qui sera le narrateur, livrant quelques éléments de description, seulement ceux qui sont nécessaires pour s’immiscer dans un lieu, la mer tempétueuse ou la nuit sinistre sous la pluie normande, par exemple. Comme nous il écoute et il regarde, il raconte aussi et dialogue avec le « bocker ». Les acteurs, Hélène Alexandridis (ou Marie Vialle), Manon Combes, Dominic Gould, Charlie Nelson (ou Régis Royer) et Pierre Yvon, en costumes modernes, vont être des amies qui se font des confidences, une femme qui raconte comment une tragique crise de jalousie de son mari l’a convaincue qu’elle devait le tromper, la vengeance ironique d’une femme qui n’est pas dupe de la liberté de vivre que lui offre son mari, un bras sacrifié pour ne pas perdre un chalut. Ils sont tous très bons. Antoine Bataille (ou Susanna Tiertant), au piano, encourage l’imaginaire des spectateurs, créant avec les petits bruits de la vie, de la pluie, de la mer, une atmosphère légère ou sombre et faisant ressortir l’ironie de la pauvre condition des hommes.

Une après-midi ou une soirée en compagnie de Maupassant où l’on se régale d’entendre son écriture claire, précise, nerveuse et son art de la chute à la fin d’un texte court et dense, où ce que la représentation théâtrale apporte à la lecture apparaît clairement. Le plus grand nouvelliste de notre littérature, très bien mis en valeur dans ce spectacle.

Micheline Rousselet

Vendredi et samedi à19h, dimanche à 15h

Théâtre de Poche Montparnasse

75 boulevard du Montparnasse, 75006 Paris

Réservations : 01 45 44 50 60 67


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