Gaëtan Vassart a adapté et mis en scène le chef d’œuvre de Léon Tolstoï, Anna Karenine. Ne retenant que neuf personnages il reste pourtant très fidèle à Tolstoï. Il s’attache à trois couples. Anna, belle, élégante, moderne qui aime aller à l’Opéra et danser se laissera séduire par un brillant officier Vronski. Fuyant un mari à la droiture rigide, attaché à maintenir la réputation qui sied à sa fonction et à son rang, elle finit par lui avouer son infidélité et le quitte. Enceinte de son amant, elle manque de mourir en couches. Son mari bouleversé lui pardonne et elle revient auprès de lui avant de repartir auprès de Vronski. Désormais mise en marge de la bonne société, tandis que Vronski continue d’y être invité et s’éloigne d’elle, privée en outre de son fils, elle ne voit plus d’issue. Le frère d’Anna, Stepan un avocat, dont la carrière doit beaucoup à son beau-frère, trompe sans cesse sa femme Daria. Celle-ci admire Anna, aimerait quitter son mari, mais en est empêchée par la présence de ses six enfants. Kitty, la jeune sœur de Daria hésite entre deux hommes. Elle est d’abord charmée par Vronski, mais celui-ci a choisi Anna. Elle finit par décider d’épouser Levine, amoureux d’elle depuis le début, un grand propriétaire terrien qui a choisi de vivre à la campagne et travaille à l’émancipation des moujiks vivant sur ses terres.

Théâtre : Anna Karénine
Théâtre : Anna Karénine

Dans son adaptation, Gaëtan Vassart ne s’en tient pas qu’à la question de l’émancipation des femmes et de la vie en couple, il fait aussi une place aux préoccupations de progrès social de Tolstoï par la voix de Levine et de son frère, un poète partisan des idées socialistes, qui prônent la modernisation des campagnes russes et l’émancipation des moujiks par l’éducation. Sa mise en scène sobre est entièrement au service du texte. Seul un immense lustre à chandelles, que l’on allume ou éteint peu à peu, marque les moments de fête et ceux du chagrin. Tous les acteurs se retrouvent sur scène pour danser et c’est le bal, tout empreint de mélancolie, comme un écho aux paroles d’Anna : « Les bals où on s’amuse n’existent plus pour moi ». Deux phares dans la nuit et un bruit effrayant de train signent la tragédie finale et cela suffit à provoquer l’émotion.

Le texte a été modernisé et les insultes crues de la femme trompée y voisinent avec des formules brillantes. Les acteurs le servent brillamment, passant de la gravité à la drôlerie, de la gaîté à la tristesse. Si tous tiennent bien leur partition, il faut surtout mentionner les femmes. Golshifteh Farahani a la beauté et la liberté d’Anna. Vêtue d’un élégant manteau noir, d’une combinaison noire ou d’une tunique de lamé argenté, elle passe d’une Anna à l’autre, de la quête du plaisir à la souffrance, de l’abattement à l’excitation. Elle est superbe. Émeline Bayart incarne une Daria insolente, drôle, brisée dans ses élans par son mari infidèle et ses six enfants, mais qui reste étonnamment vivante. Sabrina Kouroughli est une Kitty qui abandonne l’impétuosité de la jeunesse pour plus de sagesse et de profondeur sans pour autant perdre sa fraîcheur.

C’est une très belle et émouvante adaptation d’Anna Karenine qui nous est offerte ici et son visage et sa voix nous suivent bien après la fin.

Micheline Rousselet

Du mardi au samedi à 20h, dimanche à 16h

Théâtre de la Tempête

Cartoucherie

Route du Champ-de-Manœuvre, 75012 Paris

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 43 28 36 36


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