Après s’être intéressé aux artistes américains, avec un triptyque sur Jackson Pollock, Janis Joplin et Diane Arbus, Paul Desveaux s’attache à la figure d’Angela Davis. Figure historique de la lutte contre la discrimination raciale aux États-Unis, elle s’affirme non seulement comme militante noire mais aussi comme féministe, communiste, intellectuelle, attaquant toutes les formes de discriminations avec un regard internationaliste. Partant de son autobiographie Faustine Noguès a écrit un texte sensible au rythme percutant.

La pièce débute comme un entretien qu’accorderait Angela Davis à un journaliste (justement nommé Paul). L’intellectuelle qu’elle est devenue y explique ce qu’a de structurel le racisme dans nos sociétés et en quoi le féminisme et les combats de classes lui sont liés. Très vite interrogée sur la violence elle va parler des meurtres, le premier où elle n’avait rien à voir, sinon qu’elle était membre des Black Panthers, mais qui l’a amenée à être une des dix personnes les plus recherchées des États-Unis. Le « second », étalé sur douze ans, ce sont ceux commis en toute impunité par le Ku Klux Klan, là où elle a passé son enfance à Birmingham. Son arrestation et son procès pour kidnapping, meurtre et conspiration vont mobiliser des foules un peu partout dans le monde. Finalement innocentée par le tribunal elle poursuit le combat car si les Noirs ont acquis des droits souvent ils ne peuvent pas les exercer. Aujourd’hui enseignante à l’université, elle continue à penser aux luttes et à leur décloisonnement.

Astrid Bayiha incarne avec lucidité et émotion Angela Davis. À l’image de la femme forte à la pensée claire qu’elle incarne, Paul Desveaux l’a placée seule en scène, avec juste un micro sur pied et une petite table avec une loop station pour créer un univers musical. Blade AliMbaye, à la fois slammeur et rappeur, qui a déjà travaillé pour le théâtre, a crée la musique de la pièce et a coaché l’actrice. Celle-ci ne se contente pas de dire le texte, elle en magnifie le rythme en le rappant. Ce rap épouse la violence de la pensée et des actes tout en l’inscrivant dans un espace poétique. L’actrice (qui sera en alternance avec Flora Chéreau à Avignon) incarne une Angela Davis forte, intelligente, qui se raconte et met ses qualités d’analyse au service des luttes, tandis que sur le mur en fond de scène défilent des archives vidéo. Des images d’émeutes, de manifestations, les athlètes vainqueurs au J.O. levant le poing mais aussi des signes d’espoir, avec ces flics mettant un genou à terre devant les manifestants lors d’une manifestation du mouvement Black lives matter.

Du beau théâtre politique qui incite à réfléchir !

Micheline Rousselet

Jusqu’au 4 juin à 20h au Théâtre Paris Villette – 211 avenue jean Jaurès, 75019 Paris – Réservations : 01 40 03 72 23

Du 7 au 31 juillet dans le OFF d’Avignon à 14h au Théâtre des Halles La Chapelle à Avignon

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