En 1949, Peter O’Farell quitte son pays l’Irlande du Sud à 19 ans pour venir chercher du travail à Londres, emmenant Margaret, sa jeune femme de 16 ans enceinte. Mais la vie à Londres est dure pour les Irlandais, méprisés par les Anglais et condamnés aux travaux dont personne ne veut. Sans argent, sans travail ni domicile fixe, Peter se réfugie dans l’alcool. Dix ans plus tard et cinq enfants en plus, il disparaît. On ne le reverra plus, personne ne parle dans la famille de celui dont il ne reste même pas une photo, jusqu’au jour où sa petite fille Kelly se met en quête de ce grand-père disparu.

Théâtre : An Irish story
Théâtre : An Irish story

Ce grand-père disparu est celui de Kelly Rivière. Comme elle n’a pas retrouvé sa trace, elle a voulu faire vivre cette histoire, l’histoire de ces Irlandais contraints à l’exil. C’est la quête qui est l’objet de la pièce, une enquête qui la mène de la France, où elle est née, à l’Angleterre où vit sa grand-mère et à l’Irlande où elle réussit à entraîner sa mère très réticente. Comme le dit la sœur de son grand-père qu’elles retrouvent en Irlande, un disparu dans une famille de treize enfants, cela n’a rien d’anormal ! Au fil de l’enquête, on découvre cette Irlande des années trente, minée par la pauvreté, où l’Église pèse sur la vie en condamnant tout plaisir, où les femmes s’usent à élever des enfants pléthoriques, où les hommes se noient dans la Guiness et où l’émigration apparaît comme la seule issue.

Mais il y a un ton pour raconter tout cela et l’humour, pas anglais mais irlandais bien sûr, est omniprésent. Kelly cherche à retenir ses premiers amoureux en parlant de son grand-père. Mais comme elle ne sait rien de lui, elle lui invente une vie propre à retenir l’attention de l’amoureux du moment, gardien de phare disparu lors d’une tempête pour le surfeur, chef de l’IRA pour un étudiant politisé. La mère de Kelly, qui n’a pas envie de chercher ce père « qui a choisi de partir », oppose aux demandes de sa fille ses lectures Hitler, Pol Pot, etc ! Au passage Kelly Rivière s’amuse des différences culturelles, sa mère ne comprend rien aux repas qui durent des heures en France, son beau-père est surpris par le thé et le sandwich en guise de dîner en Angleterre. C’est sur la musique de La Traviata que Kathleen, la mère de Kelly lui dit un jour de déprime, « Tu vois tous les hommes finissent par disparaître » et c’est sur une ballade irlandaise dans un pub, lors d’une soirée bien arrosée de Guiness, que sa mère renoue avec l’Irlande que sa fille est en train de découvrir, éblouie.

Kelly Rivière fait vivre une galerie de personnages savoureux. Il y a en particulier une grand-mère toujours en train de proposer du thé ou des biscuits mais qui oppose à toute demande son « Dieu seul sait » ce qui a le don d’exaspérer Kelly. L’actrice glisse d’un personnage à l’autre, homme ou femme en changeant le timbre de sa voix, l’anglais succède au français (ne vous inquiétez pas, on comprend tout !) et le passage de l’anglais très oxbridge à l’accent irlandais est à la fois drôle et savoureux. Elle chante fort bien la ballade irlandaise passant avec élégance d’une voix d’homme à la voix de femme. Elle n’aura pas réussi à retrouver ce qu’est devenu ce grand-père mais ce qu’elle a appris lui aura permis de faire vivre le souvenir de cet homme disparu. Kelly Rivière est magnifique et on la suit avec une émotion mêlée de rires dans son enquête.

Micheline Rousselet

Du mercredi au samedi à 19h, le dimanche à 20h30

Relâche les 17,18 et 19 avril et le 5 juin

Théâtre de Belleville

94 rue du Faubourg du Temple, 75011 Paris

Réservations (partenariat Réduc’snes tarifs réduits aux syndiqués Snes mais sur réservation impérative) : 01 48 06 72 34


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