Frédérique Ferrer utilise sa formation de géographe et son intérêt pour les questions d’environnement pour nous proposer un cycle de cartographies théâtrales dessinant un Atlas de l’Anthropocène. Depuis sa première cartographie À la recherche des canards perdus, créée en 2010 il y a en a eu plusieurs autres, dont De la morue, présentée aussi actuellement au théâtre de l’Atelier.
Dans le but de mieux comprendre le mécanisme de la fonte des glaces et du réchauffement climatique, la NASA avait lâché il y a quelques années quatre sondes sur un glacier islandais. Attendues quelques semaines plus tard dans la Baie de Disco, elles ne sont pas réapparues. Les chercheurs ont alors décidé de reprendre l’expérience avec un matériel moins coûteux, des petits canards de bain en plastique, équipés d’une étiquette appelant qui les retrouvait à contacter la NASA. Mais des 90 petits canards lancés sur le glacier on n’a pas plus eu de nouvelles ! Où sont-ils passés ?
Face à cette question non résolue, Frédéric Ferrer se mue en conférencier à son pupitre, armé d’un ordinateur, d’un rétroprojecteur et d’un grand écran, qui présente des cartes. Dans cette recherche des petits canards jaunes, qu’en principe on ne peut pas manquer, le conférencier va examiner une par une toutes les hypothèses envisageables. Il se démène, avance avec précision dans chaque hypothèse, la carte se remplit des canards espérés mais toujours absents. Pourtant quelqu’un aurait forcément dû en voir, au moins un. Chaque réponse possible pose de nouvelles questions, qui font évoluer la carte des lieux où pourraient avoir abouti les canards. Ce faisant, au gré de la recherche sur cette histoire, qui est vraie, le spectateur apprend énormément de choses sur les glaciers, la structure de la glace, les courants marins mais aussi sur les esquimaux et la géopolitique, et surtout il rit beaucoup. Scientifiquement la NASA n’a rien appris, puisqu’on n’a pas retrouvé les canards, mais peut-être, se demande le conférencier, y avait-il un autre objet à ce lancer de canards et là on entre dans de nouvelles hypothèses, plus géopolitiques et moins drôles.
Se cultiver, réfléchir tout en riant beaucoup, pari réussi pour cette première cartographie, à suivre puisque d’autres opus nous attendent à l’Atelier ou au Théâtre Paris-Villette cet été.
Micheline Rousselet
Jusqu’au 19 juin au Théâtre de l’Atelier, Place Charles Dullin, 75018 Paris – le mardi à 19h (et le mercredi à 19h pour De la morue) – Réservations : 01 46 06 49 24 ou theatre-atelier.com –
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