Kery James ne cesse de surprendre. Non content de remplir les salles pour ses concerts, il a aussi écrit et réalisé un long métrage, Banlieusards et écrit et interprété une pièce A vif qui a connu un grand succès. Celle-ci voyait s’affronter au cours d’un concours d’éloquence deux jeunes avocats, l’un issu d’un milieu favorisé et l’autre, un Noir issu d’une banlieue parisienne, Soulaymaan. C’est lui que l’on retrouve dans À huis clos, prenant en otage le juge d’instruction qu’il juge responsable de la libération du policier qui a tué son frère lors d’une interpellation. Dans le huis clos du bureau du juge à son domicile, avec ses fauteuils confortables, ses cadres et son vase précieux, sous la menace du revolver de Soulaymaan, la confrontation peut commencer entre « deux France ». L’un parle de la police comme instrument de domination, évoque les violences policières, l’humiliation des contrôles d’identité, la mort de Nahel et les gilets jaunes blessés par les tirs policiers, l’autre y voit un instrument de protection des citoyens. L’un parle de justice à deux vitesses, l’autre d’une justice garante du bon fonctionnement de la société. Le dialogue va s’élargir à la démocratie, au pardon, à l’amour.

Le metteur en scène Marc Lainé excelle à mêler théâtre et cinéma. Ici les deux acteurs sont saisis en direct par une caméra et leur image projetée sur un grand écran surplombant le plateau permettant aux spectateurs de les voir sous différents angles. Rien de leurs expressions ne peut lui échapper et c’est presque un peu dommage. L’image attire l’œil invinciblement et l’on regrette de quitter du regard les deux acteurs. Kery James, tout en colère froide contenue ne cède rien, exige du juge qu’il l’appelle Maître, répond argument contre argument, émotion contre émotion. Le rythme de sa voix rappelle le rappeur qu’il est. Il est impressionnant. Face à lui Jérôme Kircher l’est tout autant, faisant évoluer son personnage vers plus de sensibilité et d’émotion quand il parle d’amour et de pardon. Mais même s’il s’humanise, il reste au final prisonnier de ses certitudes confirmées par son milieu social.

Une pièce politique qui attire beaucoup de jeunes et que la salle applaudit à tout rompre.

Micheline Rousselet

Jusqu’au 3 décembre au Théâtre du Rond-Point, 2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris – du mardi au vendredi à 20h30, le samedi à 19h30, le dimanche à 15h – Réservations : 01 44 95 98 21 ou theatredurondpoint.fr

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