Guillaume Vatan met en scène le texte de Nicole Sigal écrit en 2015 qui présente une suite de saynètes démontant le mécanisme de la violence quotidienne banalisée et trop souvent tue depuis des années au sein des couples.

Pour cela, elle s’est appuyée en grande partie sur les témoignages avérés recueillis en centre d’accueil pour femmes battues et sur des faits divers. Sa pièce dresse avec cruauté, poésie et humour glaçant le tableau implacable et très noir des violences faites aux femmes par leurs conjoints qui usent sur elles de l’emprise en développant une jalousie maladive, un machisme et un cynisme sans limite. Ces faits sont bien plus nombreux qu’on ne le pense et touchent tous les milieux .

225 000, c’est le nombre de femmes victimes chaque année de violences conjugales pouvant aller jusqu’aux féminicides dont les prénoms des victimes sont égrainés par chacun des comédiens au cours des pauses entre les différentes scènes et inscrits sur des feuilles blanches. Elles sont déposées au sol comme autant de pierres tombales presqu’en chemin de croix après avoir subi tant de calvaires.

Au début et à la fin de la pièce, une petite fille donne à lire à sa mère son compte rendu de week-end demandé par son institutrice. Elle y raconte de façon claire les violences que son père fait subir à sa mère et que cette dernière ne souhaite pas voir dénoncées par peur de la réaction de son conjoint et de son entourage. Sa fille, future femme, annonce la fin de cette génération de femmes battues soumises au devoir de silence. La génération  Me Too  est en marche ….

Esther, Sonia, Julie, Joséphine ou Ania essaient de lutter et parfois de fuir pour survivre mais il leur est difficile de s’enfuir. En effet, elles sont prises en otage par un conjoint ou compagnon qui les emprisonnent et les obstacles sont difficiles à passer comme cette porte de ce commissaire de police qui convainc la victime de ne pas porter plainte et de rentrer au domicile malgré l’horreur de ce qu’elle vient de lui confier.

La mise en scène de Guillaume Vatan est percutante et monte crescendo en intensité au fur et à mesure des différentes situations qui se succèdent sur un rythme soutenu dans un décor épuré accentuant l’intensité du jeu des comédiens. Magali Bros interprète avec force et poésie la femme violentée, la revenante ou la policière. Katia Miran campe aussi bien la petite fille que l’adolescente ou la femme victime qui se venge de son mari dans un numéro tragi-comique où elle parodie Liz Taylor. Quant aux deux acteurs, Mathias Marty et David Legras, ils composent des hommes manipulateurs, égocentrés et violents aussi réalistes que glaçants

Un spectacle nécessaire qui s’adresse aussi bien aux femmes qu’aux hommes .

Frédérique Moujart

Jusqu’au 7 octobre les jeudis, vendredis et samedis à 19h15 – Théâtre de l’Essaïon, 6 rue Pierre au Lard, Paris 4ème – Réservations : 01 42 78 46 42 ou www.essaion.com

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