En plus de son théâtre aussi riche que divers, William Shakespeare (1564-1616) a composé de nombreux sonnets publiés à partir de 1609. On connaît son art dramatique, moins sa poésie si ce n’est celle présente dans plusieurs de ses pièces qui contiennent moult chansons déjà mises en musique par de grands compositeurs comme Dowland, Haydn, Schubert, Poulenc, ou d’autres plus inattendus comme Gérald Finzi, Percy Grainger…

Dans Le Marchand de Venise, on trouve une phrase emblématique dont la moitié sert de titre au spectacle : « Si la musique est la pâture de l’amour, jouez encore, donnez m’en jusqu’à l’excès, en sorte que ma faim gavée languisse et meure. » Les thèmes abordés dans les Sonnets embrassent la grandeur de l’amour, la passion, la jalousie, le doute, l’interdit, le pouvoir poétique de la langue, la fuite de la jeunesse, la marche inexorable vers le déclin et la mort, mais aussi richesse et pauvreté, pouvoir et servitude, guerre et tyrannie, injustice… il y est même question de la destruction de la nature par l’homme. William fut un dramaturge et poète anglais du XVIe siècle plus que jamais visionnaire de notre monde contemporain.

À partir de cet art poétique baroque fait d’éclats lumineux et d’ombres ténébreuses, le comédien Alexandre Martin-Varroy a composé un périple littéraire et opératique, sous la forme d’une fiction contemporaine en suivant la traduction française des Sonnets par Jean-Michel Déprats pour La Pléiade, parue en 2021. Aux côtés du comédien qui incarne un poète délaissé par son amant mais nourri par la musique, l’accordéoniste Julia Sinoimeri réalise l’arrangement pour voix et accordéon. Également présent, le musicien Théodore Vibert qui joue in situ une partition électroacoustique créée sur mesure par Olivier Innocenti, une mise en sons qui enveloppe le public d’un écrin introspectif et délicat. Pour enrichir ce périple opératique et littéraire, quelques tangos argentins, pièces de Rameau, Couperin, Vlasov, Ligeti.

La mise en scène d’Alexandre Martin-Varroy et de Pénélope Driant est intensifiée par une scénographie d’Aurélie Thomas qui parachève la densité onirique du spectacle. Avec la création lumière d’Olivier Oudiou, le décor devient pictural, une fantasmagorie contemporaine qui invite le public à un voyage sonore et visuel.

Jean-Michel Déprats, présentait sa traduction de la façon suivante : « C’est le même Shakespeare qui écrit Hamlet et les Sonnets. Un rythme emporte et soutient les poèmes et les pièces de théâtre, où l’on entend et reconnaît une même voix. Pour le dire clairement, les Sonnets de Shakespeare sont donc des textes à dire, autant que des textes à lire.» Désormais à chanter et à musiquer.

Shakespeare or not Shakespeare ? Là n’est plus la question, l’art ne nourrit de tout.

Jean-Pierre Haddad

Production Compagnie Pierrot lunaire et Musique & Toile.

Coproduction Opéra Grand Avignon et Théâtre Montansier de Versailles 

Opéra Grand Avignon – L’Autre Scène, avenue Pierre de Coubertin, 84270 Vedène. Samedi 29 novembre 2025 à 20h00. Informations et réservations : https://www.operagrandavignon.fr/if-music-be-food-love


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